Des mèmes contre le racisme

- 21 classes de collèges de Seine-Saint-Denis ont participé cette année encore au dispositif départemental "Jeunes contre le racisme".
- Ainsi plus de 420 élèves ont partagé le 3 juin à Bobigny le fruit de leur travail pour lutter contre le racisme, l'antisémitisme et les discriminations.
- Vidéos, mèmes, mangas, podcasts, kamishibais... les élèves ont multiplié les créations afin de sensibiliser leur entourage contre ces fléaux.
« Moi quand je subis une blague raciste » inscrit sur une affiche montrant le visage mortifié d’un jeune Maghrébin qui arbore son plus beau sourire dans la vignette suivante intitulée « Moi quand on s’excuse d’avoir dit une blague raciste ». Les élèves du collège Jacques-Prévert de Noisy-le-Grand ont été très créatifs dans la réalisation d’une douzaine de mèmes (NDLR : image humoristique accompagnée d’un texte court) dénonçant les effets délétères du racisme et des discriminations.
D’autres collégien·nes se sont inspiré de cette même culture geek pour créer des vidéos percutantes critiquant le racisme, les clichés stigmatisant les différentes communautés… Accompagné·es par la plasticienne vidéaste Cécile Hadj Hassan, les adolescent·es ont imaginé et joué des saynettes touchantes où ils·elles miment des réactions de tristesse ou d’exaspération devant des remarques discriminantes exprimées sur un ton badin.
Un dispositif qui fait tache d’huile
Porté par l’Observatoire départemental des discriminations et de l’égalité, ce programme en est à sa quatrième édition. Il vise à sensibiliser les élèves de Seine-Saint-Denis aux préjugés reposant sur les origines, la couleur de peau, la religion mais aussi sur le genre, l’apparence physique ou le handicap. « Pendant l’année, des sessions ont été organisées au sein des collèges avec des artistes (vidéastes, dessinateurs, compositrices musicales…) qui ont initié les élèves à la réalisation de capsules vidéos ou sonores, bandes dessinées, auto-portraits… » explique Nassera Bechrouri, chargée de mission du Département contre les discriminations.
Ces projets ont été menés en lien avec les professeur·es ou l’équipe pédagogique des établissements, à l’image du collège Iqbal-Masih de Saint-Denis. « Les intervenantes ont présenté des événements historiques fondés sur le racisme comme l’esclavage ou l’existence de zoos humains à la fin du 19ème siècle » indique Jeanot, 14 ans, qui contrairement à une de ses camarades n’a jamais été victime de racisme. Avec une vingtaine d’autres délégué·es de l’établissement, le jeune homme a réfléchi au harcèlement en particulier sur les réseaux sociaux, puis a créé des podcasts audio qui ont été diffusés auprès de leurs camarades et qui seront mis en ligne sur le site internet du collège.

Les élèves de Seine-Saint-Denis se sont fait découvrir mutuellement leurs créations, qu’elles soient vidéo, audio, sous forme d’affiches…
Affiches, vidéos et punchlines
La restitution, en présence des conseillères départementales Oriane Filhol et Elodie Girardet, s’est déroulée dans une ambiance plus qu’euphorique. Les collégien·nes ont présenté leurs oeuvres dans un amphithéâtre de l’université Sorbonne Paris Nord avec beaucoup d’émotion et pour certain·es une passion manifeste, à l’instar d’Inel qui a galvanisé ses camarades. « Le racisme divise, blesse et détruit. Pourtant ce n’est pas une fatalité mais une construction humaine qui peut être déconstruite » s’enflamme-t-elle. « Aujourd’hui, nous avons parlé, demain nous devons agir pour éveiller les consciences et montrer que chaque être humain mérite le respect ».
Les élèves ont également été informé·es sur les formes plus subtiles que peuvent prendre les discriminations grâce à des associations installées à proximité immédiate de l’amphithéâtre. Parmi elles, l’association Dans le genre égales propose des animations sur l’égalité filles/garçons sous forme de photolangage ou de quizz pour libérer la parole sur le consentement, les représentations des femmes dans le sport, la politique… Un peu plus loin, le collectif TDAH Dys Droit à la différence sensibilise les adolescent·es en leur faisant lire un texte avec des groupes de mots inversés tel que le lit un enfant dyslexique ou en leur demandant d’écrire avec un gant de boxe à l’instar d’un élève dysorthographique. « On espère ainsi les convaincre de ne pas se moquer des difficultés de leurs camarades dys et les inciter à la bienveillance » déclare Mouna, mère d’un ado souffrant d’un TDAH.
40% des collégien·nes ont subi du racisme ou des discriminations raciales, selon un questionnaire remis aux élèves en cours de parcours, un phénomène parfois intériorisé ou nié par les élèves mais qui a des répercussions négatives sur leur estime de soi. Le dispositif « Jeunes contre le racisme » a ainsi permis aux jeunes de mieux identifier ces situations, savoir y réagir et se faire aider en passant par les familles, les associations de lutte contre le racisme, le collège, le Défenseur des droits… Contre le racisme, un monstre comparable à une hydre, l’information est un pouvoir !

Une dizaine d’associations étaient présentes pour informer les jeunes sur les discriminations sous toutes leurs formes et les moyens d’y faire face.
Crédit-photo : Nicolas Moulard