Michel Jazy, athlète historique du CA Montreuil, est mort
- Michel Jazy, l'homme aux 9 records du monde du 1500 au 5000m, est mort à 87 ans.
- De 1953 à 1968, ce coureur de demi-fond d'exception a donné une visibilité inespérée au maillot jaune du CA Montreuil.
- La grande famille du CA Montreuil, dont il était le président d'honneur, a ces temps-ci le cœur bien lourd.
« Ce maillot, j’y tenais beaucoup. Comme je n’en avais pas sur les premières compétitions, ma mère en a pris un blanc et l’a teint en jaune. Elle y a ajouté l’écusson du club, et il a fait avec moi le tour du monde », nous expliquait encore Michel Jazy en novembre dernier, à l’occasion des 80 ans du CA Montreuil.
De 1953 à 1968, ce coureur de demi-fond d’exception aura fait les belles heures du club jaune et bleu, bien avant qu’il ne devienne le premier club de France, avec ses 19 titres de champion de France interclubs.
L’athlète aux 9 records du monde, 17 records d’Europe, est mort ce jeudi 1er février à l’âge de 87 ans. Il laisse derrière lui une grande famille du CA Montreuil au cœur lourd et triste.
Car Michel avait beau être né Ch’ti, à Oignies, dans le bassin houiller, il avait immédiatement accroché avec ce petit club de banlieue et son président-fondateur d’alors, « Monsieur » Jean Delbert. Entre les deux, l’entente aura été immédiate et longue. « Je ne l’appelais pas M.Delbert, mais papa Delbert. Pour moi, c’était comme un second père », racontait encore Michel Jazy, arrivé au club avec son complice de toujours, Jacques Darras.
Record du 1500m, du mile, du 5000m, celui qui fut aussi médaille d’argent aux JO de Rome en 1960 aura enchaîné les meilleures marques comme des petits pains, à chaque fois sous le maillot du CA Montreuil. « Mon plus grand souvenir reste sans doute le jour où j’ai battu le record du monde du mile, en 1965. Là, les Américains m’ont vraiment respecté. Avant, je n’étais qu’un coureur à pied », nous racontait-il encore au téléphone en novembre dernier.
A sa famille, à ses amis et à la grande famille du CA Montreuil, nous adressons nos condoléances les plus sincères.
CL
Article paru dans le magazine de septembre 2017:
En cet après-midi de juin 1962, Michel Jazy est loin devant sur la piste de Saint-Maur. Il veut plus que la victoire. Il se bat contre le chrono, pour battre le record du monde du 3000 m de Gordon Pirie, 7’52’’8. Il l’a annoncé avant le départ. Deux lièvres devaient lui ouvrir la voie, mais ils ont été lâchés et depuis les 1 500 mètres le public seul le soutient. Jazy s’accroche, applique le secret livré par Jacques Anquetil : « C’est simple, tu pars à fond dès le départ et tu tiens le plus longtemps possible. » Ses jambes deviennent lourdes, douloureuses, mais Jazy ne lâche pas, tire sur ses bras et dodeline de la tête, passe enfin la ligne d’arrivée. 7’49’’8, nouveau record du monde. Son deuxième en deux semaines après celui du 2 000 mètres battu à Charléty. Jusqu’en 1966, Michel Jazy chassera le chrono et ramènera une incroyable moisson de trophées : 9 records du monde, 6 records d’Europe et 32 records de France. Tous réalisés avec le maillot du CA Montreuil. « Ma mère l’avait teint en jaune et avait cousu l’écusson du club. Je n’en ai jamais porté d’autre, à part celui de l’équipe de France. J’ai couru avec à New-York, Los Angeles, Moscou… »
Pourtant, la première passion du jeune Michel, c’est le football. A Oignies dans le Nord, il passe le plus clair de son temps à taper dans le ballon. Son père mineur déjà emporté par la silicose et sa mère partie travailler à Paris, il est élevé par ses grands parents polonais. Une fois qu’elle a trouvé un logement décent, sa mère fait venir Michel à Paris. « Un copain participait à un cross. S’il ramenait 10 coureurs, on lui offrait une paire de chaussures et un survêtement. Alors on y est allé. J’étais en tête avec celui qui avait terminé troisième aux championnats Ile-de-France. Dans la montée, il me dit de prendre le relais. Je passe en tête et après quelques temps je me retourne, je lui avais pris 50 m. J’ai gagné avec 200 m d’avance. »
La machine est lancée. Le jeune Jazy se lance dans l’athlétisme tout en gagnant sa vie : « Lorsque j’étais cadet, je travaillais de midi à minuit comme groom au Bridge club avenue de la Grande Armée. Puis je suis devenu typographe linotypiste. Je courais mes trente bornes le matin et j’allais ensuite travailler à L’Equipe. On était loin des conditions d’aujourd’hui ! » Pas de professionnalisme à l’époque, mais le sport permet tout de même la belle vie. « J’ai rencontré Maurice Genevoix, Vittorio de Sica, Gabin… Coquatrix m’offrait des bonnes places à l’Olympia, il était du même coin du Nord que moi ! »
Pour Michel Jazy, le sport, c’est aussi une histoire d’amitié et de fidélité. Avec son entraineur, René Frassinelli qu’il suivra en 1953 au CA Montreuil. Un club qu’il n’a jamais quitté et dont il est toujours licencié et président d’honneur à bientôt 80 ans. A l’époque, le président du CAM est Jean Delbert et entre l’industriel et le sportif se tisse un lien filial. « Il était comme un père, il m’a énormément apporté. Nous déjeunions deux fois par semaine, à la brasserie Le Régent à la Croix de Chavaux. Un club comme le CA Montreuil, c’est une deuxième famille. »
Par Georges Makowski
Photographies Presse Sports, Bruno Lévy
Un palmarès inégalé
– Médaille d’argent sur 1 500m aux Jeux olympiques de rome (1966)
– Médaille d’or sur 1 500m aux championnats d’Europe (1962)
– Médaille d’or sur 5 000m aux championnats d’Europe (1966)
– Médaille d’argent sur sur 1 500m aux championnats d’Europe (1966)
– Champion de France du 800m en 1961 et 1962
– Champion de France du 1 500m en 1956, 1957, 1958, 1960, 1963 et 1964
– Champion de France du 5 000m en 1966
– Champion de France de cross-country en 1962, 1965, et 1966
Ses records
– 9 records du monde
– 17 records d’Europe
– 51 records de France
Un exploit
Durant le seul mois de juin 1965, il établit 4 records du monde, 5 records d’Europe et 9 records de France !
Tous les commentaires2
C était un grand homme du demi fond. Pas de la même génération mais en tant qu athlète je l admirais énormément du fond de ma petite piste cendrée de Casablanca.
Je suis triste pour pas dire effondré
MICHEL a été mon idole depuis ROME
Je suis né en 1950 donc j’ai suivi son énorme carrière depuis mes 10 ans et toute mon adolescence (vecu à CHAMPIGNY très longtemps pas loin de la VGA ST MAUR et du CA- MONTREUIL )
Je salue l’être COURAGEUX et qui m’a fait rêver
Condoléances à tous ses proches et amis
ALAIN