InBEATween, la danse libératrice
- Fondée il y a 2 ans à Aubervilliers, cette association veut faire découvrir les danses de club dérivées du hip-hop : la house, le waacking ou encore le voguing.
- Ses fondatrices, Astou Cissé, Zaïra Eddine et Sabrina Belkacem, entendent mettre en avant la libération que peut représenter la danse et la mise en mouvement du corps.
- Cette jeune association incarne bien le plan d’accompagnement du hip-hop, voté par le Département en octobre dernier.
Dimanche 8 octobre. Astou Cissé et Zaïra Eddine animent un atelier lors du concert 100 % rap made in 93, organisé par le Département au Point Fort d’Aubervilliers. Pour rien au monde, les deux complices de l’association InBEATween ne pouvaient manquer cet événement, lancé pour célébrer notamment l’avènement du hip hop en France il y a 40 ans. Entre deux battles sous le beau chapiteau de danse de l’association Villes des Musiques du monde, ces deux passionnées soufflent un peu pour répondre à nos questions.
« Les danses qu’on veut faire connaître- la house, le waacking ou encore le voguing – sont des danses nées aux Etats-Unis de cultures noires et latinos. Elles nous ont attirées par leur liberté et leur authenticité. Au-delà du plaisir évident qu’on peut avoir à les danser, on pense aussi qu’elles peuvent avoir un aspect libérateur, parce que se mouvoir, c’est prendre confiance en soi », explique Astou Cissé, la présidente d’InBEATween.
« Ce qui est impressionnant dans toutes les danses hip hop, c’est qu’elles laissent beaucoup de place à l’affirmation de l’identité de chacun, alors que dans les danses dites classiques, ça peut avoir un côté très uniforme », renchérit Zaïra Eddine, habitante de Saint-Ouen.
Waack, le bruit des claques
Imprégnées de culture hip hop, ces deux passionnées ont décidé, juste après le Covid, de mettre leurs forces en commun pour lancer InBEATween, une association basée à Aubervilliers qui fait donc la part belle à la « culture club » américaine, mais dont les danses sont entre temps largement métissées avec d’autres cultures européennes ou africaines.
« Le waacking par exemple, c’est une danse inspirée de mouvements de gifles, d’où dérive d’ailleurs son nom : « waack » dans les comics américains, c’est le bruit des claques. C’est une danse dans laquelle se retrouvait notamment la communauté queer noire aux Etats-Unis », détaille Astou Cissé.
Biberonnée comme Zaïra à la culture hip hop dès son adolescence, la jeune femme, qui a grandi à Méry-sur-Oise, s’est établie à Aubervilliers depuis 8 ans pour des raison professionnelles- elle travaille dans la finance – mais aussi pour pouvoir continuer à se former aux danses hip hop. « La danse, c’est une partie importante de ma vie. Pour moi, c’a eu un côté libérateur, émancipateur», raconte celle qui a grandi aux sons de la radio Générations. « Notorious BIG, Tupac, NTM, j’écoutais ça en allant et en revenant du lycée. La culture hip hop dans sa globalité, c’a été un souffle pour une bonne partie de ma génération. C’est une culture qui vient d’une blessure, de populations précaires et discriminées et je pense que c’est ça qui lui donne encore aujourd’hui cette énergie très explosive et puissante », poursuit la quadragénaire.
L’affirmation de soi par le corps
Tous les mois, InBEATween propose donc des ateliers de découverte de danses, en compagnie souvent de prestigieux invités. Après s’être posée à la salle des 4 chemins grâce à une convention avec le Théâtre de La Commune, la jeune association ambitionne maintenant de grandir. Et pourquoi pas à travers le plan hip-hop, lancé en octobre dernier par le Département… Une initiative qui se propose à la fois d’accompagner les talents du département, d’augmenter le nombre d’ateliers hip hop dans les collèges et qui prévoit aussi un volet mémoire, qui reviendrait sur l’aventure du hip hop en Seine-Saint-Denis.
Pour InBEATween, cela pourrait signifier des interventions en plus, comme celle qui se dessine à l’été prochain, quand Astou et Zaïra pourraient faire groover la fan zone des Jeux olympiques de La Courneuve. House, waacking et voguing rejoindraient ainsi le temps d’une soirée leur cousin du breaking, soudainement sacré sport olympique.
Christophe Lehousse
Photo: Sylvain Hitau