Le soleil pour seul horizon

Le soleil pour seul horizon
Art contemporain
  • Le cycle des Veilleurs arrive à Saint-Ouen pour une année. Cette œuvre d’art qui a parcouru le monde entier, offre un moment privilégié au lever ou au coucher du soleil à tous ceux et celles qui y participent. A la fois un moment unique, à vivre en solo et une performance artistique.
  • 730 personnes se succèderont ainsi, bien à l’abri, dans la structure conçue spécialement par le designer et scénographe Benjamin Tovo.
  • Le projet est orchestré par Joanne Leighton, chorégraphe et performeuse.

Extrait de l’interview réalisée en 2021 à l’occasion du Cycle des Veilleurs qui avait lieu à la maison du parc départemental Jean-Moulin-Les Guilands, située entre Montreuil et Bagnolet.

Le cycle des Veilleurs a commencé le 15 décembre. De quoi s’agit-il ?

Les Veilleurs est une performance, une chorégraphie ouverte à un très grand nombre où je demande à chaque personne de s’installer dans un abri en hauteur pour veiller, au lever ou au coucher du soleil pendant une heure. Je demande de se tenir debout, de tenir une présence, d’imprimer le corps dans la ville.

La performance est rythmée par le lever et le coucher du soleil. Quelle est la place du soleil dans votre projet ?

Le soleil est notre horloge. C’est lui qui va nous chronométrer. Avec le lever et le coucher du soleil, on revient à quelque chose d’essentiel en fait. La lumière. L’activité dans la ville. C’est fondamental. Mais nous ne le voyons pas toujours dans nos vies si modernes, dans nos maisons, dans nos routines. Ce projet va chercher à donner du temps, à ralentir, à prendre le temps pour soi et pour les autres.

Comment est né votre projet ? Quelle fut votre première idée ?

J’ai toujours été fascinée par le fait d’aller sur une position en hauteur dans une ville ou un paysage naturel. Grimper, on le fait tous dans l’humanité. C’est là où on prend un petit peu de recul, de hauteur, on regarde. Le germe, c’est ce moment de silence où on sait qu’on est arrivé. On est sur le sommet de la montagne, le toit du bâtiment, en hauteur. On arrête. Et c’est ce moment de silence. Comme Beckett le dit, c’est le moment où le chef d’orchestre va lever sa baguette avant que l’orchestre ne joue. Qu’est-ce qui se passe pendant ce temps-là ? J’ai le désir d’installer une poésie dans la ville, de disséminer l’art dans la ville pour changer notre vécu, notre paysage.

Vous êtes chorégraphe. Lorsque vous demandez aux veilleurs de se tenir debout et immobile, est-ce toujours de la danse ?

Je ne parlerai pas, moi, d’immobilité car il n’y a jamais d’immobilité en fait. Si on est là, on est là. Il y a John Cage, le compositeur américain, qui va nous dire qu’il n’y a pas de silence, qu’il y a toujours des bruits. J’en suis là avec la danse. Le corps est vivant. Le cœur bat, les pensées vont venir et partir. Se tenir debout pendant une heure ce n’est pas passif, c’est actif. J’ai voulu créer une œuvre qui permettrait à toute personne de prendre sa place à l’échelle de la ville. Les Veilleurs, c’est commémorer -comme le ferait une statue dans la ville- le fait que chaque citoyen-ne, chaque personne est vraiment très importante, unique. Et qu’on est connecté. On forme cette communauté. Une participation individuelle pour une veille collective. Cette idée de répétition et de rassemblement sont les bases de mon travail chorégraphique.


« Les Veilleurs » est une performance qui a d’ailleurs beaucoup voyagé….

En effet, elle a commencé en 2011 à Belfort. On poursuit ce projet depuis dix ans. A Rennes, Laval, Haguenau, Évreux, Fribourg en Allemagne, Dordrecht aux Pays-Bas et Graz en Autriche. Elle joue actuellement à Munich en Allemagne et Hale en Angleterre. Avec toujours les mêmes modalités : 730 personnes et toujours sur une année.

La chaîne ne s’est jamais interrompue ?

Non. Même pendant les confinements qui ont vu nombre de spectacles s’annuler, Les Veilleurs n’a pas été interrompue.

Que cherchez-vous à faire avec cette œuvre ?


Pour moi, cette pièce est aussi un grand rituel. Deux fois chaque jour, il y a la rencontre avec l’accompagnateur. C’est très humain. L’accompagnateur ou accompagnatrice va accueillir le veilleur, l’installer, chronométrer l’heure qui passe. « Les Veilleurs » c’est l’ouverture à l’autre. Ce sont les moments de rassemblement qui m’intéressent. Comment on peut créer le vécu ensemble autour d’un projet artistique ? On participe individuellement pour œuvrer ensemble, danser ensemble.

A chaque lever du soleil, à chaque coucher, un nouveau Veilleur arrive. Vont-ils tous à un moment se rencontrer ?

Bien sûr. A la fin, il y aura une grande fête de clôture où on va fêter le passage des 365 jours et célébrer la chaîne qu’on a individuellement créée ensemble. Fêter notre challenge qui est de ne pas avoir un jour sans veilleur.

Et vous, comment allez-vous rester en contact avec l’ensemble des Veilleurs ?

Pour préparer chaque veille, on invite les participants à un atelier qui se déroule tous les quinze jours. Et chaque trimestre, pour les veilleurs on organise des rencontres, des soirées de rendez-vous où mes danseurs sont là. On y lit les textes des veilleurs et regarde les photos qui se sont accumulées tout au long de l’année. C’est important pour moi de créer des moments de réflexion sur la présence des veilleurs et d’en parler ensemble.

Quelles sont d’ailleurs les motivations des Veilleurs ?

Les raisons pour lesquelles le veilleur va participer sont personnelles. C’est vraiment propre à chacun. Chacun choisit sa date et son heure : un moment précis. Il y a ceux qui souhaitent fêter un anniversaire, le mariage, la naissance d’un enfant, la perte de quelqu’un. Cela peut être quelqu’un qui vient d’arriver en ville et qui veut s’inscrire dans un projet artistique intimement connecté à la ville. Un papa qui veille le matin et son fils le soir. Cela peut-être un couple : la femme le matin et son mari le soir. Cette performance est aussi là pour soulever l’histoire personnelle de la ville, du territoire. C’est aussi un endroit de paroles pour les citoyens et citoyennes. En cela, il est très démocratique, très accessible.

En quoi cette performance silencieuse est un endroit de paroles pour les citoyen-nes ?

Le projet comprend une collecte des traces : des photos, des textes. On va demander au veilleur d’écrire quelques lignes après la veille pour partager avec nous son expérience, son ressenti, d’avoir veillé sur la ville, sur le territoire. Et on va demander à l’accompagnateur de prendre un portrait du veilleur et une photo du paysage pour voir le passage des saisons. Ces traces, photos, pensées vont s’accumuler sur le site web dédié au projet les veilleurs : www.wldn.fr

 

Crédits photo : Sylvain Hitau

Réserver sa place :

Si vous avez plus de 16 ans, rendez-vous dans le grand parc de Saint-Ouen, où vous pourrez participer à ce projet artistique. Il suffit de réserver votre place le jour qui vous convient sur

www.lecycledesveilleurs.fr

Grand Parc de Saint-Ouen
12 rue Albert Dhalenne

93400 SAINT-OUEN

48.9153927 , 2.3295736

web parcsinfo.seinesaintdenis.fr/
www.lecycledesveilleurs.fr/

Accès Accès

Métro : Ligne 13, Mairie de Saint-Ouen

Métro : Ligne 14, Mairie de Saint-Ouen

Vélib’ : Clef des Champs – Albert Dhalenne (9m)

Vélib’ : Bateliers – Quai de Seine (41m)

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