Nora Cornolle, l’athlète aux multiples combats

Nora Cornolle, l’athlète aux multiples combats
MMA
  • Combattante de MMA, Nora Cornolle, qui est née et habite toujours à Épinay-sur-Seine, a remporté le 2 septembre à l’Accor Arena, devant 15 000 spectateurs, son premier combat sous la bannière de l’UFC, la plus grosse ligue mondiale.
  • Dans l’octogone, cette ancienne championne de muay thaï, titulaire d’un Master en communication, est parvenue à faire oublier la maladie auto-immune à la thyroïde dont elle souffre.
  • Avec l’UFC, elle a signé pour quatre combats mais espère prolonger l’aventure et pouvoir vivre un jour de sa passion.

Le 2 septembre 2023 est une date que Nora Cornolle n’est pas près d’oublier. Ce jour-là, à l’Accor Arena (palais omnisports de Paris-Bercy) devant 15 000 spectateurs acquis à sa cause et scandant son prénom à tue-tête, elle s’est imposée par décision unanime des juges face à la Panaméenne Jocelyne Edwards (poids coq), pourtant plus expérimentée, pour ses débuts à l’UFC, la plus importante organisation mondiale de MMA (arts-martiaux mixtes) qui pour la deuxième année consécutive a fait le show à Paris au cours d’une soirée où les stars de l’octogone ont défilé. « J’ai fait des dizaines de combats dans ma carrière, mais je n’avais jamais connu une telle ambiance. Difficile dans un tel contexte de ne pas être gagnée par l’émotion, relate cette Spinassienne de 33 ans. Mais paradoxalement, le stress que j’ai accumulé pendant toute ma préparation s’est complètement dissipé dès la sortie du vestiaire. Je ne me suis pas sentie asphyxiée comme je peux l’être d’habitude. J’ai pris le temps d’observer la salle qui ne m’a envoyé que des bonnes ondes. Je savais à ce moment-là que j’allais faire quelque chose de bien. » Pourtant, Nora, qui fêtera ses 34 ans à la fin de l’année, jouait gros. Elle qui a signé pour (seulement) quatre combats avec l’UFC savait pertinemment qu’une défaite d’entrée de jeu aurait terni son image et, probablement, scellé son avenir.

Depuis cette opposition, dont elle porte encore les stigmates – une blessure à l’œil notamment – Nora Cornolle a doucettement repris le chemin de l’entraînement et attend avec impatience la date de son deuxième combat. « J’espère que ça se fera d’ici la fin de l’année car j’aimerais rester sur cette bonne dynamique et montrer que ce succès n’a pas été le fruit du hasard. Contre Edwards, personne ne m’attendait. Ceux qui ne me connaissaient pas ne donnaient d’ailleurs pas cher de ma peau. Mais j’ai eu neuf semaines pour me préparer (un vrai luxe dans les sports de combat). Lors du deuxième combat, il va falloir que je confirme face à une adversaire potentiellement plus forte encore, un challenge de plus que j’ai hâte de vivre. »

En attendant, pour les besoins de cet entretien, Nora nous donne rendez-vous dans le centre de Paris, dans une salle de sport où elle avait ses habitudes, « avait » car les gérants viennent de mettre la clé sous la porte (« les conséquences du Covid toujours et encore »). « Je n’ai pas de salle d’entraînement attitrée car je ne dépends plus d’aucun club. Ce n’est pas facile tous les jours en termes d’organisation, mais c’est le prix de l’indépendance. » Aujourd’hui, ses lieux de prédilection se trouvent, et c’est un hasard, tous en Seine-Saint-Denis : au On Air Fitness de La Courneuve (pour la partie préparation physique), au Club Bagnolet Lutte 93 (pour travailler le corps à corps) et à l’Alpha Fight Club de Saint-Ouen (pour les combats au sol). « L’idéal serait que tous ces équipements soient regroupés au même endroit mais en France, rares sont les structures à proposer une telle offre », fait-elle constater. Seul édifice stable : son staff composé de trois hommes de coin (trois coaches qui la suivent dans tous ses déplacements) et d’un préparateur physique, lequel est indispensable dès lors qu’on vise le haut niveau.

Un voyage en Thaïlande qui va tout changer

Nora, dont la qualité principale est un mental à toute épreuve, n’a que deux ans d’expérience dans le MMA. Cette discipline ayant été légalisée au début de 2020, elle n’a pas eu à disputer des compétitions à l’étranger ou dans la clandestinité comme la plupart de ses adversaires. Après une première partie de carrière étincelante en muay thaï (cinq fois championne de France, dont deux titres chez les professionnels, championne d’Europe et médaillée d’argent lors des Jeux mondiaux en 2022), le MMA n’était finalement pour elle qu’une suite logique. « En muay thaï, les capacités d’évolution atteignent vite leur seuil et comme je souhaitais m’inscrire uniquement dans le circuit pro, j’avais besoin d’un nouveau défi, vivre une nouvelle aventure où j’avais de nouveau tout à prouver. »

Passionnée par les sports de combat depuis sa tendre enfance, elle a pourtant dû attendre ses 21 ans avant d’enfiler ses premiers gants. « Pour mes parents, c’était niet, raconte-t-elle en esquissant un sourire, ils craignaient que je me fasse défigurer, d’autant que j’étais de nature bagarreuse, je partais au quart de tour. » Nora est née et a grandi à Épinay-sur-Seine, dans un HLM du quartier de La Source-Les Presles. Le papa est ambulancier, la maman employée du bureau à Air France et le grand frère, féru d’arts martiaux, a rapidement quitté le cocon familial pour s’engager dans la Marine nationale. « Épinay, c’est ma vie. Aujourd’hui, j’ai mon propre appartement mais j’habite toujours à La Source, un quartier qui connaît quelques difficultés mais auquel je suis attachée. » Son parcours scolaire est exemplaire : une fois son bac L en poche, elle entame une prépa LSH (langues et sciences humaines) au lycée Auguste-Blanqui, à Saint-Ouen, puis intègre le – réputé – CELSA où elle décroche un Master en communication. C’est d’ailleurs dans le cadre de ses études, lors d’un stage de six mois qu’elle effectue dans une agence de publicité en Thaïlande, qu’elle découvre le muay thaï. « J’ai toujours été attirée par les sports de combat mais pas par celui-ci car je le trouvais trop violent. Seulement à Bangkok, il est inévitable et je me suis rapidement prise au jeu. Sur place, un monsieur qui s’entraînait tous les jours dans la salle que je fréquentais m’a pris sous son aile et m’a enseigné toutes les techniques de ce sport. » Quelques semaines plus tard, elle fait son premier combat à l’occasion des fameuses Fight Nights qui se tiennent régulièrement devant l’immense centre commercial MBK Center de Bangkok. Elle met son adversaire K.O dès le deuxième round. Une nouvelle aventure peut commencer.

La maladie, son autre combat

De retour en France, Nora rejoint le Puteaux Scorp Thaï où elle s’impose très vite comme une combattante de premier plan mais son ascension connaît un arrêt brutal à la fin de 2018. Alors qu’elle ne se sent physiquement pas bien, la jeune femme apprend qu’elle souffre de la thyroïdite de Hashimoto, une maladie auto-immune qui entraîne une inflammation de la thyroïde. « J’ai découvert cette pathologie quand j’ai pris du poids de manière inexpliquée. Je fais un sport avec une catégorie de poids donc j’ai toujours fait gaffe à mon alimentation. Quand j’ai des crises, je suis très fatiguée, je perds mes cheveux et j’ai des bouffées de chaleur, un état absolument pas compatible avec l’activité que je mène. » Alors Nora se documente sur cette maladie, apprend à écouter son corps, échafaude un programme de préparation physique adapté, s’interdit tout écart « qui se paierait de toute façon cash » et tente d’apprivoiser au jour le jour cette maladie. C’est grâce à ce mantra qu’elle a pu envisager une carrière dans le MMA. A Bercy, lors de son dernier combat, sa thyroïdite a pointé le bout de son nez lors de la pesée. « Mon corps a failli me dire non et cette étape si importante de la pesée aura été mon premier combat. Heureusement, j’ai eu quelques jours devant moi pour perdre les grammes en trop. »

Cette rigueur est aussi guidée par les objectifs que s’est fixés la Spinassienne. Si actuellement elle dit « survivre plutôt que vivre » de son sport, elle compte d’ici peu en faire son unique gagne-pain et espère intégrer à l’issue de son prochain combat le top 15 UFC. « Pour me consacrer à 100 % au MMA, j’ai consenti beaucoup de sacrifices, j’ai notamment arrêté toute activité professionnelle », dit-elle. Nora a travaillé pendant quelques années dans le monde de la pub mais, lasse de cette « vie sans horaires, sans répit et beaucoup trop stressante », elle a claqué la porte. En MMA, son bilan de sept victoires pour une seule défaite en à peine un an est flatteur mais la championne sait que le chemin est encore long. « Dans ce sport, au niveau international, je n’ai encore rien fait et l’histoire reste à écrire. J’espère d’ici l’an prochain que l’UFC renouvellera mon contrat et, qu’à terme, je décrocherai la ceinture dans cette ligue, le graal ultime. » Et là, son seul nom suffira à remplir des Accor Arena tous les week-ends.

Grégoire Remund

Photos: ©Nicolas Moulard

Tous les commentaires1

  • Tomtom

    Bravo Nora force a toi le 07 04 🤞🤜🤜🤜

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