Les Archives diplomatiques, des trésors à La Courneuve
- Les Archives du Ministère de l'Europe et des Affaires étrangères sont rassemblées depuis 2009 dans un bâtiment de 20 000 m2 à La Courneuve.
- Il conserve des fonds exceptionnels incluant les traités signés par la France, les dépêches d'ambassadeurs, des cartes et photographies anciennes...
- Nous avons exploré les coulisses de ce service d'archives...
Les Archives diplomatiques de La Courneuve sont une fenêtre ouverte sur le monde d’une exceptionnelle richesse. Initialement au Quai d’Orsay, les quelques 80 kms linéaires d’archives sont depuis plus de 15 ans conservés et mis à disposition dans un bâtiment moderne et épuré construit par l’architecte Henri Gaudin. Le centre possède des fonds et collections exceptionnels : dépêches transmises par les ambassadeurs et consuls depuis le XVIIème siècle, traités signés par la France, des documents autographes signés des grands noms de l’Histoire comme Richelieu, Chateaubriand, Charles de Gaulle…
Une installation récente à La Courneuve
Gardés dans d’excellentes conditions de conservation, ces fonds comptent parmi les plus riches au monde pour étudier l’histoire de la France, notre pays pouvant se prévaloir d’une continuité dans la conservation de ses archives depuis le 17ème siècle. Avant de rejoindre La Courneuve, les archives diplomatiques sous l’Ancien Régime étaient préservées au Vieux Louvre puis à Versailles (près du château), puis après la Révolution, dans deux hôtels particuliers du 7ème arrondissement puis au Quai d’Orsay.
Près de 29 000 traités sont entre autres archivés, dont le plus ancien, la Sentence arbitrale du 15 juillet 1304 rendue par Amalric, comte de Narbonne, fixant les limites du Comté de Foix et de la Cerdagne, remonte au Moyen-Âge. D’autres, comme le traité de Westphalie signé en 1648, ont marqué la naissance de l’Etat-nation moderne, consacrant l’Etat comme l’acteur central des relations internationales.
Ces pièces sont maintenues à un niveau constant de température et d’hygrométrie, ni trop sec, ni trop humide, pour garantir la conservation des documents. Sur les étagères métalliques, les 80 kms d’archives sont entreposées dans des cartons noirs ignifugés, à plat pour les ratifications, à la verticale pour les traités et les documents annexes. Les correspondances avec les monarques et les chefs d’état étrangers y sont précieusement protégées, ainsi que les correspondances diplomatiques entre Paris et les ambassades, conservées dans des gros volumes reliés de cuir, classés par pays et par date.

Les magasins d’archives conservent les différents documents dans des conditions optimales.
Une mine d’or accessible
L’ensemble des documents, incluant 300 000 photos, est consultable en salle de lecture par les usager·ères, dans le cadre du respect des délais de communicabilité fixés par la loi. Pour les consulter, les visiteur·euses créent un compte de lecteur en ligne, ouvrant droit à une carte de lecteur·rices. Une fois sur place, ils et elles déposent leurs affaires dans un grand vestiaire pour accéder à la très belle salle de lecture du centre, qui peut accueillir jusqu’à 160 personnes.
Les usager·ères présent·es consultent des archives originales ou examinent des microfilms (une salle dédiée aux microfilms étant en accès libre). D’autres pianotent sur le site internet des Archives diplomatiques, où de très nombreux documents numérisés sont à leur disposition sur les postes informatiques. « Les usagers qui le souhaitent peuvent photographier ou scanner les pièces pour les étudier dans le cadre de leur recherche, dès lors que les documents sont librement communicables », nous explique-t-on. « Par ailleurs, chaque lecteur peut être aidé par un conservateur, dès son arrivée ». De même, une bibliothèque riche de 500 000 volumes est à leur disposition, incluant dans ses collections des ouvrages de référence sur le droit international, la législation française et étrangère, l’économie, l’histoire…, des revues et journaux, des documents diplomatiques divers…
Un service de restauration ultra-moderne
Au rez-de-chaussée du bâtiment, plusieurs salles sont dédiées à la restauration et à la numérisation de certaines oeuvres. Des documents qui peuvent être très anciens sont d’abord « nettoyés et dépoussiérés » quelquefois en fonction de leur état avec des aspirateurs adaptés ou des brosses douces en poils de chèvres. Dans l’atelier principal, deux restauratrices spécialisées en arts graphiques travaillent sur des documents qui peuvent être composés de papier, de cuir, de parchemin et d’autres matériaux.
« Pour restaurer les Avis diplomatiques adressés au Marquis de Lulin de 1675 à 1676, nous avons séparé chaque feuillet et effectué un doublage en papier japonais pour consolider le papier » explique Patricia Coste, cheffe adjointe du pôle conservation et recherches. » Nous avons dû, ensuite reconstituer des cahiers afin de refaire une reliure, un travail de précision et de patience ». Les restauratrices agissent aussi bien sur des volumes reliés souvent constitués de cuir ou de parchemin que des liasses de papier.

Une restauratrice réintègre une carte dans un recueil de journaux, correspondances et lettres sur les Guerres balkaniques, datant de 1912.
Numériser pour mieux sauvegarder – et communiquer
A proximité des ateliers de restauration, Quentin s’attelle à numériser un traité signé entre la France et la Grande-Bretagne en 1855, conservé sous forme d’un document multi-matériaux composé d’une couverture de velours, d’un sceau de cire rouge protégé d’un boîtier orfévré duquel dépassent des passementeries en soie. L’agent utilise différentes techniques de numérisation comme le scanner à plat, la photographie, la photogrammétrie employables en fonction de la complexité et de la fragilité des documents.
« Certains documents sont fragiles et difficilement manipulables. Leur numérisation, qui peut être en taille réelle et particulièrement fine permet de diffuser les archives hors les murs et les rendre accessibles au grand public, dans le cadre de la dématérialisation » déclare Quentin, responsable de la photographie, assisté par deux techniciens. Entre 2 et 3% des archives conservées ont été numérisées et une partie d’entre elles sont consultables sur le site internet de l’institution.

Crédit-photo : Patricia Lecomte
