Il était une fois le parc Georges-Valbon

Il était une fois le parc Georges-Valbon
Histoire
  • Comment a été décidée la création d’un grand parc à La Courneuve ?
  • Hippodrome, cynodrome et même éventuel stade olympique en 1924 pour les JO de Paris, cet espace a connu de nombreuses vicissitudes.
  • Avant d’acquérir son profil définitif tel qu’on le connaît aujourd’hui, le parc de La Courneuve est passé par de multiples étapes. Retour sur l’histoire du parc.

Cet été, il sera le site de célébration où l’on pourra vivre les Jeux olympiques et Paralympiques de Paris 2024 : retransmission d’épreuves, animations sportives et culturelles, grands concerts… Le parc départemental Georges-Valbon sera un incontournable lieu de fête et de rassemblement.
Avant de devenir le magnifique parc que des milliers de Séquano- Dionysiens fréquentent régulièrement, véritable poumon vert du département, le parc a été une vaste plaine. Avant de voir le jour, tel qu’on le connaît aujourd’hui (3e plus grand parc d’Ile-de-France, classé Natura 2000), il est passé par de nombreux projets. Le parc de La Courneuve, c’est toute une histoire…

Un projet olympique contrarié

« Après avoir été longtemps tourné vers l’agriculture, le paysage occupé par les deux parcs (La Courneuve et Marville – NDLR), connaît au début du XXe siècle des transformations majeures », explique Hélène Caroux, co-auteure avec Benoît Pouvreau, de l’ouvrage consacré aux parcs de La Courneuve. Au début du XXe siècle, avec une explosion démographique, l’extension de Saint- Denis, La Courneuve et Stains offre des possibilités d’aménagement et de créations d’équipements. La Courneuve compte encore 700 hectares cultivés sur 760 en tout, et a l’avantage de posséder une gare. Tout naturellement, les regards se portent sur elle, enparticulier ceux des lotisseurs. Mais pas que… La Société sportive d’encouragement à l’élevage du cheval acquiert entre 1907 et 1909 une surface totale de plus de 41 hectares sur les territoires de Saint-Denis et La Courneuve, et décide de construire un hippodrome. Il comptera trois pistes circulaires (plat, steeple, haies) et une piste en forme de huit pour le steeple ; deux tribunes, l’une de 100 mètres pour le public, l’autre de 30 mètres pour les propriétaires. Ce projet s’embourbera rapidement en raison du terrain humide, traversé par des cours d’eau. On abandonne vite l’idée d’organiser des courses de chevaux.

Que faire ? Ce vaste terrain avec ses tribunes ne pouvait rester inutilisé… Après avoir été désignée comme ville olympique en 1921, Paris a devant elle trois ans pour organiser les sites des JO. Si certains existent déjà, il manque néanmoins un lieu pour les épreuves de natation et un stade olympique. En 1922, la candidature de l’hippodrome de La Courneuve est rendue publique, à l’initiative de la Société du parc des sports de La Courneuve, fondée par Jefferson Davis, un gentleman anglais propriétaire d’écuries de courses, qui décide de faire de La Courneuve, un immense terrain de sports. Il s’engage à construire, à sa charge, les trois stades manquants (athlétisme, nautique, tennis et armes de combat) ainsi que tous les équipements nécessaires. Et cerise sur le gâteau, d’obtenir de la Compagnie des chemins de fer du nord, la création d’une ligne qui amènerait les spectateurs sur le terrain même du stade. Cette proposition alléchante ne sera pas retenue et c’est celle du Racing-Club, à Colombes, qui remporte la palme. Nouvelle déconvenue.

Cross national féminin organisé par l’Auto, 26 mars 1922. Photo de presse, Agence Rol, BNF / Gallica

Un cynodrome sans lendemain

Dans les années 1920, se développent des courses de chiens (lévriers) autour de pistes ovales. Le vif succès obtenus par ces courses en Angleterre et aux Etats-Unis, où les paris sont autorisés, donnent à certains l’idée de transformer – une fois passée la déception de la candidature olympique – l’ancien champ de courses en cynodrome. Les tribunes sont modernisées, un restaurant voit le jour, les anciennes écuries sont aménagées en chenil. Les installations électriques sont particulièrement soignées car les courses se déroulent le soir : 200 lampadaires en béton armé sont disposés autour de la piste afin que les spectateurs puissent suivre le lièvre mécanique et la meute de chiens le poursuivant. Malgré tous ces efforts, le site ne fut jamais consacré en tant que cynodrome, même si quelques courses eurent probablement lieu. Ces aménagements sans lendemain offrent une opportunité au Conseil général de la Seine d’acquérir, en 1930, ces terrains qu’il convoite depuis quelques années, en complément de ceux qu’il possède déjà de l’autre côté de la route.

La route d’accès principale du cynodrome avec son imposante structure en béton ornée d’un médaillon représentant deux lévriers. (La technique des travaux, n°10, octobre 1930)

L’idée d’un parc de loisirs émerge

En 1924, un concours d’idées propose de créer une cité satellite sur des terrains situés sur les communes de La Courneuve, Le Bourget, Dugny et Stains. La plaine des Vertus à La Courneuve, est le lieu idéal pour réaliser ce projet avec des terrains libres, non loin du champ de courses, bien desservie par le train et la route. L’équipe lauréate propose une cité satellite pour 80 000 habitants sur environ 800 hectares, associant logements, activités, commerces et transports en commun. Avec le temps, malgré l’acquisition de parcelles, le projet est fragilisé par la mort de son initiateur l’urbaniste Auburtin, mais aussi par les circonstances économiques et le coût de l’assainissement des terrains. Ce nouveau projet tombe à l’eau. Exit la cité satellite.

Un projet de parc voit le jour

Ce n’est que partie remise pour les élus départementaux. Grâce à d’importantes acquisitions foncières, et animés par une volonté politique d’aménagement du territoire, l’idée d’un grand parc, avec cette fois-ci les moyens indispensables, fait son chemin. Ces année 1930 marquent un tournant important pour l’histoire du parc de loisirs et du parc des sports de La Courneuve, qui désormais font partie du patrimoine foncier départemental de la Seine. « Une véritable politique publique apparaît avec cet ensemble de terrains, souligne Hélène Caroux, l’un destiné à la pratique sportive, alors que les installations sportives sont peu nombreuses, et l’autre consacré aux loisirs et à la nature, alors que pas un espace de ce type n’existe dans le nord de Paris. » En 1934, un avant-projet est présenté : il s’agit de la première trace de l’existence du futur parc. Le projet se veut réaliste, en raison des difficultés budgétaires et de la topographie des terrains. Le parc occupera 260 hectares et son implantation se fera dans la zone centrale de ce qui constitue aujourd’hui le parc Georges-Valbon. On y plantera des marronniers sur les vastes espaces accessibles pour les jeux, tandis que les parties boisées seront réservées aux promenades. « Malgré l’espoir que fit naître le Front populaire, ce parc comme celui des sports resta en l’état – mais pour quelques mois seulement, puisqu’un nouveau projet d’un seul et même parc grand parc de plus de 800 hectares, est alors sur le point d’être élaboré », écrit Hélène Caroux. C’est alors que la guerre éclate.

Sous le régime de Vichy

En décembre 1941, la revue collaborationniste L’Illustration publie sur une double page un avant-projet d’aménagement des futurs parcs de La Courneuve et des sports de Marville. Le projet envisagé en 1934 est triplé en surface pour atteindre 800 hectares. Il intègre dorénavant dans son aménagement paysager, le parc des sports et on le baptise en lui donnant, en ces temps occupés, le nom du chef de l’Etat français : Pétain. Doriot et Laval ne sont pas très loin. Mais face aux temps de disette et de difficultés d’approvisionnementalimentaire, les parcelles sont activement cultivées. L’heure n’est plus à la réalisation du parc. Après guerre, dans les années 1950, en pleine reconstruction du pays, le parc des sports commence à se moderniser avec la construction d’un gymnase. Dans le même temps, Albert Audias, le paysagiste qui avait dessiné les plans en 1941, est reconduit pour poursuivre le projet. En 1955, le principe d’aménagement du parc de La Courneuve est approuvé par l’Assemblée départementale avec une enveloppe de 40 millions de francs destinés à l’étude du projet et aux premières plantations. Le plan reprend les grandes lignes définies en 1941, mais la surface est réduite de moitié.

Création du Département de la Seine-Saint-Denis

La réorganisation administrative de la région parisienne voulue par le Général de Gaulle, instaurée par la loi de juillet 1964, porte de trois à huit, le nombre de départements qui existeront à partir du 1er janvier 1964, dont celui de la Seine-Saint-Denis. Avec sa disparition annoncée, le département de la Seine prend une certaine distance avec le projet du parc. Les crédits sont gelés et les éléments attractifs supprimés. Le projet de lac de plus de 10 hectares, prévu pour la deuxième tranche, est à son tour abandonné, en raison de la disparition de la plupart des rivières devant l’alimenter. Les surface boisées sont augmentées, celles des pelouses réduites. Seuls le théâtre de plein air et le centre hippique sont maintenus. Ce dernier, initialement géré par le Cercle hippique Roussel, ouvre en 1972 sous l’égide du Département de la Seine- Saint-Denis. Avec l’élection de son premier président Georges Valbon en 1967, il faudra attendre 1970 pour que lui soient officiellement attribués le parc départemental de La Courneuve, ainsi que les parcs des sports de Marville et de Bobigny. Ils prennent alors le nom de parc interdépartemental des sports. En juillet 1970, les promeneurs peuvent enfin découvrir le parc de La Courneuve, attendu depuis cinquante ans, qui prendra en 2010, un an après sa mort, le nom de son premier président Georges Valbon.

Terrain des essences, emprise de 13 hectares en cours de dépollution avant renaturation et intégration au parc départemental. Photo : Manolo Mylonas © Département de la Seine-Saint-Denis

Le parc départemental Georges-Valbon en une expo et un livre.

Visages, paysages

Photographies de Manolo Mylonas

Pour fêter les 50 ans du parc, une exposition in situ donne à voir les paysages majestueux mais aussi les visages et les scènes de la vie quotidienne du parc. Cette exposition est le fruit d’un travail partenarial entre le service du parc Georges-Valbon (DNPB) et le Service du Patrimoine culturel (DCPSL). Elle est visible du 20 avril au 30 septembre dans le parc.

Patrimoines et paysages en Seine-Saint-Denis. Les parcs de Marville et de Georges-Valbon.

Les productions du Effa, 192 p. Sortie prévue mi-mai 2024.

Il s’agit d’un ouvrage collectif piloté par le Service du patrimoine culturel du Département et auquel ont participé plusieurs de ses chargés d’inventaire et archéologues et avec la contribution d’autres Directions (DSA, Direction de la Communication) ainsi que des enseignants de l’Ecole national supérieure de paysage Versailles- Marseille et d’une chargée de recherche à l’Ecole des ponts.

 

Tous les commentaires1

  • Jean-Luc David

    Formidable poumon vert, idéal lieu de promenade en landeau pour ma petite-fille, qui habite à quelques minutes à pied d’une entrée du parc. Lorsqu’elle sera plus grande, elle appréciera certainement encore ce paradis des lapins.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *