Le handi-judo se développe en Seine-Saint-Denis
- En mars, Sergio Biswas, du Judo club drancéen, est devenu le premier judoka de Seine-Saint-Denis porteur de handicap mental à obtenir sa ceinture noire.
- A Gagny, l'EG Judo est pionnier en matière de para judo adapté et organise cours, rencontres et séjours.
- Le Département soutient ces projets inclusifs et innovants en direction des publics éloignés de la pratique sportive.
Dans la vie d’un judoka, la remise de la ceinture noire est un moment important. En avril dernier, c’était au tour Sergio Biswas du Judo club drancéen de recevoir ce symbole de travail, de persévérance et de maîtrise technique. Et Sergio s’est particulièrement investi pour y parvenir, lui qui est étudiant à l’IME (Institut Médico Educatif) Ladoucette. Le Judo club drancéen entretient des liens avec cette structure depuis 2010, et organise deux cours hebdomadaires pour ses jeunes pensionnaires porteurs de handicap mental. Depuis son premier cours en 2016, Sergio s’y est tout de suite investit, il raconte : « J’ai tout de suite aimé. J’ai des amis, je travaille. Le 1er dan (la ceinture noire ndlr), ça me rend fier ! » Jean-Jacques Rusca, directeur sportif et président du Comité départemental judo 93 explique « Sergio est un exemple pour tous les autres judokas, porteurs de handicap ou non. Il s’entraîne avec tout le monde, est toujours présent, attentif, appliqué. C’est une grande joie de le voir porter sa ceinture noire ! »
Le Judo club Drancéen est actif auprès des jeunes en situation de handicap mental, un travail mené particulièrement par sa trésorière, Nathalie Rusca : « Je suis aide-soignante et depuis 2009, je travaille auprès d’enfants autistes sévères au sein de l’hôpital Robert Ballanger à Aulnay sous -Bois. Nous organisons des séances de judo, adaptées bien sûr à leur handicap, et fin septembre grâce au soutien du Département, nous allons les emmener en séjours au Lac de l’Aillette, dans l’Aisne. Ce sera le deuxième séjour que nous organiserons. Il·elle·s sont capables de faire énormément de choses, tout est possible. Il faut simplement leur ouvrir une petite porte… »
Soutien du Département
Zaïnaba Saïd Anzum, conseillère départementale déléguée au sport était présente lors de cette cérémonie et tenait à féliciter aussi bien le jeune judoka que l’ensemble du Judo Club Drancéen : « Il était important pour le Département d’être présent aujourd’hui. La ceinture noire obtenue par Sergio, tout comme les actions que le club mène au quotidien sont une parfaite illustration de l’inclusion par le sport. Le Département soutient ces initiatives, ces projets innovants en direction des publics éloignés de la pratique sportive. »
Labellisé fédération française handisport
A l’Entente Gabinienne de Judo, on accueille des judokas en situation de handicap mental depuis plus de dix ans. Une activité qui tient à cœur de la dynamique présidente Muriel Boussuge qui a tissé des liens avec les instituts médicalisés environnants, réservé un créneau hebdomadaire et organise des événements handi-judo comme le 3 juin dernier dans l’Arena de Gasny. L’EGJ est même le seul club de Seine-Saint-Denis à avoir obtenu le « label club » de la fédération française handisport, toutes disciplines confondues.
Tout sourire dans son judogi, Ali, 21 ans, attend les samedis matin avec impatience : « J’aime bien venir au judo, je me sens bien après ! » Sa mère qui l’accompagne explique « J’ai connu ce club avec ses cours adaptés par internet. Il n’y a pas beaucoup de clubs qui acceptent d’accueillir des autistes. Comme le judo lui fait du bien, j’aimerai l’amener à pratiquer d’autres sports, mais lesquels ? »
Sur le tatami, pas moins de 4 personnes sont présentes pour encadrer la douzaine de judokas. Apolline Bricou 17 ans, et Dayana Alger 13 ans, sont volontaires pour venir à cet entraînement du samedi matin. Apolline explique : « J’ai vu le cours, et ça m’a tout de suite intéressée. Au début ils peuvent être impressionnants, certains ne parlent pas, mais on parvient à communiquer. Moi je suis toujours présente à ce cours, ça fait du bien de voir qu’on peut donner le sourire avec le judo ! »
Le professeur Rudy Vallet, fidèle au club depuis ses 5 ans, dirige son cours « de la même façon qu’un cours habituel : échauffement, travail technique, randori (combat d’entraînement ndlr). Il faut simplement plus les assister, les guider, mais intrinsèquement le cours se déroule de la même façon. » Avec juste ce qu’il faut d’adaptation comme lorsque lors de l’échauffement il lance : « Allez, maintenant on rampe comme Spiderman ! » A 25 ans, ce professeur 4e dan est désormais le référent handicap au sein de du comité judo 93, travaille pour aider d’autres clubs à accueillir plus de personnes en situation de handicap.
Une parenthèse, pour les parents aussi
Tandis que Tout le monde s’active sur le tatami, les parents en profitent pour discuter entre eux, rire et bonne humeur sont de mise. Catherine Jacquemond, mère de Christophe, 20 ans et interne dans un foyer reconnait que « ça nous fait aussi beaucoup de bien à nous parents de les laisser et souffler une heure ! Entre parents, nous nous retrouvons avec plaisir, nous vivons les mêmes choses. Nous nous échangeons les conseils, souvent avec beaucoup d’humour et de gaité! »
A propos des bienfaits du judo, elle considère que « c’est un très bon sport, aussi bien pour ses apports en psychomotricité que sur le fait d’être ensemble. » Mr Verrier, père de Gabriel 11 ans, reconnaît que « c’est compliqué pour lui d’être avec d’autres enfants. Ici, il sait qu’on ne va pas le regarder. Et les profs savent s’adapter, car il est super actif, mais peut s’arrêter d’un coup si quelque chose le frustre. A la maison il crie dans ses cas-là, ici… pas forcément ! »
La mère de Mathis raconte qu’il « fait ici des choses qu’il ne fait pas à l’IMP, apprendre à marcher en arrière par exemple. Et ici, personne ne regarde personne ! Parce que l’inclusion, c’est un beau mot, mais ça ne marche pas avec tout le monde. De toute façon, à l’école par exemple, les AVS (Assistant·e de Vie Scolaire) ne sont pas toujours là, c’est plus de l’esbrouffe… » Lors du cours, Mathis est constamment suivi, guidé, encouragé par Mahina Pontes. Âgée de 25 ans, elle a commencé à 14 ans à participer à l’encadrement de ce cours handi-judo. « Mathis est toujours dans son coin, un doigt dans l’oreille. Il faut constamment le stimuler, venir le chercher, l’accompagner. » Sans ce suivi particulier, il ne pourrait pas faire de judo, pas plus que le professeur Rudy pourrait diriger les activités des autres. Mais à l’EGJ, comme le dit Muriel Boussuge « On trouve des solutions, on les invente. Il est possible d’avoir autant de cours d’essai qu’on veut, ce n’est pas l’important. Tout comme on peut s’arrêter, revenir 6 mois plus tard… La vie est déjà suffisamment compliquée comme ça, l’important c’est de trouver des solutions pour être bien ensemble ! »
Photos : Franck Rondot