Oumar Sissoko, l’ange gardien du Montreuil FC

Oumar Sissoko, l’ange gardien du Montreuil FC
Portrait
  • Dimanche 21 décembre, le Montreuil FC recevra à Bobigny l’US Chauvigny lors des 32e de finale de Coupe de France.
  • Un match historique pour le club séquano-dionysien qui compte dans ses rangs un atout de poids : le gardien de but Oumar Sissoko.
  • Nous avons rencontré cet ancien joueur professionnel, revenu dans son club de cœur à l’intersaison.

Affublé d’un bas de survêt’ du PSG – on découvrira plus tard que cela n’a rien d’anodin – , Oumar Sissoko nous reçoit dans les locaux du club où il s’est engagé l’été dernier, le Montreuil FC. Un retour aux sources pour ce gardien de but de 38 ans, professionnel jusqu’en 2019, qui n’avait pas foulé les pelouses du stade Robert-Legros, dans le Haut-Montreuil, depuis ses 12 ans. « C’était le bon moment pour revenir, glisse-t-il. Le plus gros de ma carrière est derrière moi mais je suis encore hyper motivé et je suis venu ici pour relever un défi sportif, pas pour être en pré-retraite. Le MFC est le club de la ville où je suis né, où j’ai grandi et où j’ai fait mes débuts en tant que footballeur, c’est finalement un choix assez logique. Et puis, j’en étais à un moment de ma carrière où c’était possible. Quand le président Abdoulaye Sow, qui est aussi un ami très proche, m’a demandé de venir, je n’ai pas hésité longtemps. »

Dimanche 21 décembre, le joueur passé par des clubs comme Metz, Ajaccio, Orléans ou Le Havre, et qui compte quelques capes dans les catégories de jeunes en équipe de France aux côtés de Karim Benzema, Hatem Ben Arfa et Samir Nasri, rien que ça, va disputer le match le plus important de l’histoire du MFC : un 32e de finale de Coupe de France à Bobigny contre l’US Chauvigny (Vienne), un club qui évolue une division au-dessus (National 3, contre Régionale 1 pour Montreuil) mais qui est en grande difficulté dans son championnat. Alors que les Montreuillois, bien que lourdement défaits lors de la dernière journée à Courbevoie (5-2), talonnent la réserve du Paris FC qui occupe la tête du classement. « On peut se qualifier car le niveau des équipes n’est pas très éloigné, estime Oumar Sissoko. Mais c’est la Coupe, et dans cette compétition plus qu’une autre, rien n’est joué d’avance. »

Lors du tour précédent contre Granville (Manche), au stade Auguste-Delaune de Bobigny, une pelouse qu’il connaît très bien pour avoir évolué l’an passé au FC 93, Sissoko avait été le héros du match en effectuant deux arrêts lors de la séance des tirs aux buts. « Ça a été un moment très particulier car, en raison de mon statut d’ancien pro et des attentes placées en moi par le staff, mes coéquipiers et les supporters, j’ai ressenti une pression supplémentaire, confie l’intéressé. Tout le monde était persuadé que j’allais les tirer d’affaire, je n’avais pas le droit de les décevoir. » Au coup de sifflet final, les fans du club ne s’y sont d’ailleurs pas trompés, nombre d’entre eux ont accouru vers le dernier rempart du MFC pour l’étreindre ou pour un selfie. « Il y a une vraie effervescence en ce moment à Montreuil avec nos exploits en Coupe, constate Oumar. Le club a la chance de compter sur un groupe de supporters qui nous suit partout, à domicile comme à l’extérieur, ce qui est très rare en R1. Cela donne envie de se surpasser. »

« Aujourd’hui, jouer signifie kiffer »

S’il n’a aucune envie de raccrocher les crampons, le Montreuillois prépare depuis quelques années sa reconversion. En 2022, il a passé le BEF (brevet d’entraîneur de football qui l’autorise à coacher des clubs amateurs) et obtenu, deux ans plus tard, le CEGP niveau 2 (certificat d’entraîneur de gardien de but). Deux précieux sésames qui lui ont ouvert en juillet dernier les portes du PSG où il est en charge de la préformation des gardiens de but. « C’est une nouvelle casquette que j’endosse avec plaisir et fierté car je reste dans un domaine où je me sens légitime et dans un cadre hyper pro avec une vraie exigence du haut niveau », dit-il. Et comme un bonheur n’arrive jamais seul, il a, dans la foulée, également intégré le staff de la sélection malienne des U23 (Espoirs). « 2025 aura été une grosse année pour moi, celle des changements et des bons choix, cette fois. »

Des choix, Oumar a dû en faire beaucoup dans sa carrière. Pour le meilleur et pour le pire. Son expérience au Havre, où il a ciré le banc deux années durant sans jouer la moindre minute, lui reste par exemple en travers de la gorge. « On m’avait fait venir pour être numéro 1, le coach a décidé que je serai numéro 2 à vie », lâche-t-il, amer. Cette situation l’a même encouragé à quitter un monde professionnel dans lequel il ne se sentait plus à sa place pour jouer, à seulement 32 ans, dans des championnats mineurs. « Je suis sorti de cette aventure dégoûté mais j’en ai tiré un enseignement qui m’a permis d’avancer et de découvrir plein de gens formidables et bienveillants dans le milieu amateur. Aujourd’hui, jouer signifie kiffer. »

« Tout le monde veut devenir le nouveau Mbappé »

Champion de Ligue 2 avec le FC Metz en 2007, 3e de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) en 2012 avec le Mali, le Montreuillois a connu un parcours exemplaire dans les catégories jeunes. Après avoir fait ses premiers pas à l’Association sportive culturelle Montreuil Bel Air (ASCMB) où il a été très vite triple surclassé (ses coéquipiers avaient trois à quatre ans de plus que lui) et porté quelques années le maillot vert et noir du MFC (qui s’appelait alors Red Star), il file à ses 12 ans à l’INF Clairefontaine, le temple du football français qui a préformé des joueurs comme Thierry Henry, Nicolas Anelka, Blaise Matuidi, Kylian Mbappé et tant d’autres encore. « J’ai passé le concours d’entrée qui comportait plusieurs étapes, se souvient le portier. Sur la ligne de départ, nous étions probablement quelques centaines, voire quelques milliers, et à l’arrivée, nous avons été 23. C’est à ce moment-là que j’ai pris conscience que j’avais les capacités pour devenir professionnel. Et c’est au FC Metz que j’ai signé, à 20 ans, mon premier contrat. »

Oumar, dont les parents vivent encore dans l’appartement du quartier du Bel Air où il a grandi, est revenu à Montreuil avec un statut de grand frère. « Je dis souvent aux jeunes du club de profiter, je leur rappelle aussi qu’ils ont beaucoup de chance de jouer dans un club sain et ambitieux, même s’il évolue en R1. Car aujourd’hui, à l’heure des réseaux sociaux, l’ambiance dans les centres de formation a beaucoup changé. Les joueurs passent leur temps à se challenger sans se fixer aucune limite. Je suis content d’avoir vécu à mon époque. Aujourd’hui, tout le monde veut devenir le nouveau Mbappé. »

Si ses nouvelles activités en dehors des terrains lui prennent beaucoup de temps, Oumar s’investit pleinement dans son club avec lequel il nourrit de grandes ambitions. « Au vu de la première partie de saison qu’on a réalisée, la montée en N3 est largement dans nos cordes, affirme-t-il. Certes, en face, il y a le PFC, mais ça se jouera sur des détails. » La Coupe de France, où le MFC fait figure de Petit Poucet, représente quant à elle du bonus. « Pour la première fois, on va passer en direct à la télévision (lors du multiplex diffusé sur beIN Sports), ça va être un grand moment. On va profiter, tout donner, et puis on verra… » Mais comme cette année, tout semble lui réussir, on se dit que Montreuil est prêt pour signer un nouvel exploit.

Grégoire Remund

Photos: ©Eric Garault

À lire aussi...
Football

Au Montreuil FC, on a toujours la pêche

Toujours en lice pour le 8e tour de la Coupe de France, une performance inédite, le club du Haut-Montreuil rencontre le 29 novembre Granville, club évoluant 2 divisions au-dessus. L’occasion de mettre en valeur ce club de tradition ouvrière, qui[...]

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *