Prithika Pavade veut rebondir plus haut encore
- A 20 ans, la pongiste de Seine-Saint-Denis a déjà participé deux fois aux Jeux olympiques, est 20e mondiale, compte 14 titres nationaux dont un senior simple, médaillée de bronze mondiale par équipe, etc.
- Après des Jeux de Paris stoppés en 16e de finale, retour sur le quotidien d’une championne encore en devenir.
Depuis ses 14 ans en 2018, elle fait partie de la Génération 2024 qu’on a destiné à participer et briller aux Jeux olympiques de Paris. Toutes ces années, Prithika s’est pliée avec ténacité aux entraînements sans fins, aux déplacements pour les stages, les compétitions, aux cours à rattraper, aux moments passés loin de ses proches, à la fatigue… A 17 ans, elle a participé aux JO de Tokyo, en 2022 elle remporte son premier titre de championne de France seniors en simple, en 2023 elle remporte la médaille de bronze par équipes aux championnats d’Europe, en 2023 le bronze par équipe aux mondiaux et le bronze européen en double mixte. Pour participer aux Jeux à Paris, elle a subi une année de préparation épuisante, tant physiquement que mentalement, lancée dans une course au classement mondial. Tout cela avec une insistance des médias, auxquels il faut répondre avec le sourire, malgré la pression. Et Paris ne fut pas la fête espérée. Les Jeux de Prithika se sont arrêtés en 16e de finale, bien plus tôt qu’espéré. Après seulement deux petites semaines de repos, il lui a fallu se lancer à nouveau dans le circuit international à la poursuite de cette terrible petite balle blanche. Alors six mois après les jeux, comment va Prithika Pavade ?
Vous avez participé cet été à vos deuxièmes Jeux olympiques. Est-ce un bon ou un mauvais souvenir ?
Les deux ! Le positif, c’était cette ambiance incroyable, 5000 personnes qui chantent, crient, encouragent les Français, mais aussi les étrangers, qui n’avaient jamais connu une telle intensité. L’émotion était folle ! Avec en plus deux médailles pour les garçons. Mais c’est aussi un mauvais souvenir car je n’ai pas réussi à produire le niveau de jeu que j’aurais souhaité, pas réussi à m’adapter à une adversaire qui a très bien joué. Et pour la compétition par équipes, je n’ai pas réussi à emmener la France en quart de finale. J’aurais voulu jouer davantage et procurer encore plus d’émotion à ce public, ces Jeux on m’en parlait depuis que j’étais toute petite ! Et c’est le moment le plus difficile de ma carrière. Pas facile à mettre de côté… Ça commence à aller mieux.
Deux semaines seulement après les JO, vous étiez de nouveau en compétition. Est-ce que vous ne jouez pas trop ?
Entre les compétitions nationales et internationales, le calendrier est super chargé. Je pars minimum deux semaines par mois, et la préparation avant les Jeux était très dense ! Il fallait absolument grimper dans le classement mondial pour participer. Beaucoup de compétitions en Asie, avec décalage horaire, où le niveau est tel qu’on enchaîne les défaites. J’adore la compétition, mais au bout de six mois, j’ai eu une grosse baisse de carburant ! Mais il a fallu s’accrocher pour aller aux Jeux…
Que faites-vous pour vous ressourcer ?
Passer du temps avec ma famille, mes amis, me poser devant une série… Des choses simples qui paraissent plus précieuses lorsqu’on a moins de temps. Et ma mère cuisine très bien, nous sommes d’origine tamoule et je raffole de ses plats indiens : biryani, tous ces plats avec riz en sauce, du poulet ,des crevettes. Il y a une diversité de plats incroyable. Je suis allée 3 fois à Pondichéry d’où mes parents sont originaires et je m’y sens bien, chez moi, au calme au milieu de gens bienveillants.
Il y a une grande différence d’ambiance entre les 5000 personnes survoltées des JO de cet été et les rencontres de Pro A à La Raquette à Saint-Denis, moins de 100 personnes…
Oui, mais rien n’est comparable aux JO de Paris, même sur le circuit international on est loin d’avoir cette ambiance-là. Et c’est compliqué de ramener beaucoup de monde en région parisienne. Nous ne sommes pas des footballeurs et il y a tellement d’événements sportifs… Mais Saint-Denis, c’est un public d’habitués, des personnes avec lesquelles je me sens bien. J’ai bien conscience qu’il est normal qu’il y ait une baisse d’intensité médiatique, à nous de nous appuyer sur l’union, l’harmonie qu’il y a eu lors des Jeux pour raffermir les liens entre les sportifs et le public français.
Le tennis de table est un sport individuel, mais qui se joue également en double (Prithika a remporté en janvier le bronze du double mixte au tournoi WTT d’Oman) ou par équipe. Que préférez-vous ?
J’aime tout, avec une préférence pour le simple en termes d’accomplissement. Par équipe, en club ou avec la France, j’aime vraiment beaucoup. Ça procure des émotions de dingue, multipliées par dix et partagées avec des personnes qui deviennent tes amies. Le fait de s’aider, d’échanger alors que d’habitude nous sommes en concurrence… J’aime les doubles mixtes aussi, c’est agréable de se confronter aux garçons. J’adore voir que mon service ou un autre coup l’a gêné, c’est agréable !
Le dossier de Seine-Saint-Denis magazine sera consacré au sexisme et les jeunes. Avez-vous vous-même été confrontée au sexisme ?
Oui, des remarques de temps en temps sur le fait que le sport féminin, ça n’est pas aussi spectaculaire que le masculin, ou bien sur le fait qu’il soit moins médiatisé, les inégalités salariales. Bien sûr que le sport féminin est différent du masculin, mais nous sommes tous des êtres humains, des sportifs de haut niveau et, homme ou femme, on sacrifie beaucoup de choses. C’est aussi pour ça que c’est cool de mettre un garçon en difficulté avec mon service !
Où en êtes-vous de vos études ?
Depuis 3 ans j’en suis toujours à ma première année de licence sciences de la nature. Mener de front une carrière sportive et des études scientifiques, c’est compliqué, même si l’INSEP et la Sorbonne font au mieux pour me faciliter la tâche. Mais c’est beaucoup de connaissances à apprendre, plus des travaux pratiques alors que je suis si souvent partie… Mais c’est ce que j’aime, alors j’avance à mon rythme.
Vous avez commencé à six ans le tennis de table au club du Bourget puis rapidement vous avez intégré le Saint-Denis tennis de table 93. Qu’est-ce que ces clubs représentent pour vous ?
C’est au Bourget que j’ai débuté avec Nicolas Greiner, que j’ai obtenu mon premier titre de championne de France et ensuite je suis partie à Saint-Denis pour évoluer dans les meilleures divisions et aussi parce qu’ils avaient plus de moyens pour m’aider à progresser. J’y suis depuis 10 ans, et je porte beaucoup d’affection et suis redevable de la fidélité de Jean-Claude Molet le président, mais aussi Cathy, Julien, toute l’équipe ! Ce sont des personnes sur lesquelles je sais que je peux compter, et pas seulement à propos du ping. Je m’y sens chez moi.
Avez-vous eu des propositions de la part d’autres clubs ?
Oui, un peu à l’étranger, un tout petit peu en France.
Imaginez-vous quitter un jour Saint-Denis ?
Difficile de répondre à cela, pas pour l’instant en tout cas. J’ai encore envie de remporter plusieurs titres français et la Champion’s League avec Saint-Denis. Après, cela va dépendre de comment j’évolue en tant que joueuse au niveau international. J’aimerais aussi jouer dans les ligues asiatiques dont le niveau est tellement relevé, pas forcément sur toute une saison mais sur des périodes. Si je veux progresser, il faudra que j’emprunte des voies différentes que celle des autres Françaises et même étrangères.
©Photos Sylvain Hitau
Prithika Pavade en 3 lieux
Chez moi !
Au Blanc-Mesnil, dans la maison familiale. Je n’y suis pas souvent alors j’apprécie !
L’école Jean-Mermoz au Bourget
C’est mon école, j’y ai plein de bons souvenirs et c’est l’endroit où je passais beaucoup de temps avant de basculer dans la vie de sportive de haut niveau. J’y avais beaucoup de camarades, la directrice était gentille avec moi lorsque j’ai commencé les compétitions nationales.
Le Club Bourgetin de tennis de table et le Saint-Denis TT 93
Ces deux clubs à égalité, Le Bourget car j’y ai commencé et rencontré Nicolas Greiner, Saint-Denis qui m’a accueillie et m’a fait évoluer jusqu’à devenir joueuse professionnelle de niveau international. Je m’y sens chez moi et il y a des personnes sur lesquelles je peux compter, pas seulement à propos du ping.