Avec Bondy ou les Bleues, Fagueye Sy a le futsal dans la peau

Avec Bondy ou les Bleues, Fagueye Sy a le futsal dans la peau
Futsal
  • Joueuse et capitaine de l’équipe féminine de futsal du Bondy Cécifoot Club, Fagueye Sy enchaîne les bonnes performances, individuelles et collectives, depuis deux saisons.
  • Après avoir remporté la Coupe de Paris et la Coupe départementale l’an passé, son équipe est actuellement leader du championnat.
  • Des bons résultats qui ont valu à cette agente du Département plusieurs convocations en équipe de France où elle a su s’imposer à une vitesse étonnante.

Vista, science du placement, défense de fer et « meneuse de femmes » hors pair. Sur les terrains de futsal et dans le vestiaire, Fagueye Sy, 27 ans, fait parler sa classe et son leadership naturel. Avec son brassard de capitaine du Bondy Cécifoot Club (BCC), section futsal féminin, autour du bras, elle n’hésite pas à replacer ses coéquipières ou donner des consignes tactiques. Une vraie taulière. Et pourtant, cette jeune femme n’a que trois ans de pratique dans les jambes. « Je m’y suis mise quand j’ai appris que le BCC montait, en 2021, une équipe féminine de futsal, raconte Fagueye. Le projet était alléchant et ambitieux. Un club comme celui-ci, dont les deux vitrines sont le handisport – avec le cécifoot – et le futsal féminin [il existe aussi une équipe masculine de futsal], n’a aucun équivalent en France. Cette politique d’inclusion se traduit au quotidien. Ici, en tant que femme, je me sens hyper valorisée, le club nous met constamment en avant et veut faire de nous une grosse équipe de futsal en France. »

Si le Bondy Cécifoot Club est une structure très jeune, son ascension est, à l’image de celle de Fagueye Sy, fulgurante. L’an passé, le club s’est adjugé la Coupe de Paris, une compétition de niveau régional, la Coupe départementale et la deuxième place du championnat de France R1 (le plus haut niveau régional mais aussi national car, chez les femmes, il n’existe pas encore de ligue réunissant en son sein les meilleures équipes du pays, le découpage se fait donc par région). « La saison dernière a certes été fantastique mais elle aurait pu l’être beaucoup plus : la défaite subie contre notre grand rival Diamant Futsal Évry à la dernière journée devant 500 personnes au Palais des Sports de Bondy nous a coûté le titre d’un point. Se remettre de cet échec a été très dur mais cela nous a aussi permis de ne pas croire que tout était facile ou déjà acquis. » Il faut croire que le BCC a tiré les enseignements de cette déconvenue puisqu’il occupe actuellement la place de leader du championnat, à mi-parcours. « En R1 Ile-de-France, la région qui compte évidemment le plus de pratiquantes en raison de sa démographie, il y a 10 équipes de très haut niveau, le moindre relâchement se paie cash, il va donc falloir lutter jusqu’au bout. »

Débuts dans le football au Stade de l’Est Pavillonnais

Comme un bonheur n’arrive jamais seul, celle qui, dans le civil, est agente du département, chargée de mission RH au service recrutement précisément, a connu sa première sélection en équipe de France en septembre dernier. « Incroyable, je ne m’y attendais pas du tout, confie Fagueye. Au départ, avec ma coéquipière Founé Simaga, nous faisions partie des réservistes. Mais en septembre dernier, nous avons été appelées par le sélectionneur Pierre-Étienne Demillier pour disputer deux rencontres amicales face à la Pologne. » Une double confrontation qui s’est soldée par deux défaites assez nettes qui ont permis à la défenseure de constater le fossé qui existe entre le monde professionnel et le monde amateur mais aussi, et surtout, de vivre une expérience inoubliable – notons que, depuis, elle n’a pas manqué un seul rendez-vous avec les Bleues.  « Quand la Marseillaise a retenti, j’ai ressenti énormément d’émotion, pensé à ma famille et à mon parcours qui n’est pas commun. » 

« Pas commun » car son amour pour le ballon rond survient assez tard. Enfant, Fagueye consacre toute son énergie à l’athlétisme. Après avoir remporté les Foulées Bondynoises, une course à pied qui réunit chaque année les élèves des écoles élémentaires de la ville, l’AS Bondy Athlétisme lui propose de rejoindre le club. Devenue ado, quelque peu lassée d’écumer les pistes, Fagueye veut s’essayer à un autre sport. Le football ? « Même pas en rêve, pour moi c’était une activité réservée aux garçons, je n’y avais clairement pas accès. » Mais un voyage en Espagne organisé par la Ville de Bondy ébranle ses certitudes. « Sur place, on a croisé l’équipe féminine seniors du Stade de l’Est Pavillonnais [Les Pavillons-sous-Bois] qui disputait un tournoi où elles représentaient la France. Leur façon de jouer et le fait qu’elles étaient très à l’aise m’ont impressionné. Je me suis alors dit qu’il fallait que je teste. » À l’époque – nous sommes en 2011 -, le Stade de l’Est Pavillonnais fait partie des rares équipes du département à compter une section féminine. C’est donc tout naturellement que Fagueye jette son dévolu sur ce club. « Dans les catégories jeunes, il n’y avait pas suffisamment de filles pour faire une équipe féminine, du coup, je jouais avec les garçons. J’étais larguée, ils ne jouaient qu’entre eux, je ne touchais jamais le ballon, et quand j’en héritais, j’avais peur de mal faire », se souvient la Bondynoise.

Face à ce désolant constat, elle convainc le coach de mettre sur pied une équipe 100 % féminine, laquelle ira des U11 aux U15. « J’ai fait venir plein de copines, certaines d’entre elles n’avaient aucune appétence pour le foot mais le plus important était de faire nombre et d’être visibles. » La mayonnaise prend et, grâce au bouche-à-oreille, le groupe s’étoffe. « Dans le secteur, le Stade de l’Est Pavillonnais a certainement été l’un des premiers clubs à disposer d’une équipe féminine dans toutes les catégories d’âge, des U9 aux seniors, il est précurseur », fait remarquer Fagueye. Qui fait ses classes et n’a de cesse de progresser année après année. Très investie au club et développant une passion pour le foot, elle décide de passer ses diplômes pour devenir éducatrice. Et hérite dans la foulée du groupe U9/U10/U11. En 2021, des rumeurs bruissent autour de la création d’une équipe féminine de futsal au Bondy Cécifoot Club. L’affaire se concrétise et Fagueye, sollicitée par une amie, se laisse tenter par cette nouvelle expérience. « On peut parler de coup de foudre pour le futsal. Et puis le projet novateur du BCC est arrivé à un moment où le foot à 11 devenait plus un devoir qu’un plaisir, explique l’intéressée. J’ai privilégié mon bien-être et je pense avoir fait le meilleur choix de ma vie. » Suite à son départ conjugué à ceux de nombreuses coéquipières qui décident de la suivre, la section féminine du Stade de l’Est Pavillonnais périclite et sera dissoute l’année suivante.

La Coupe du monde et un jour les JO ?

Avec les Bleues du futsal, en octobre 2024, face à la République tchèque.

Au BCC, Fagueye fait déjà partie des meubles. Elle connaît tout le monde et se dit très proche de l’équipe de cécifoot. Tidiane Diakité, star de la discipline en France, est d’ailleurs un collègue de sa mère à la mairie de Bondy. « Côtoyer ces joueurs m’a ouvert les yeux sur le handicap, m’a permis de gommer de nombreuses idées reçues, on se donne beaucoup de force les uns les autres. » Aux Jeux paralympiques de Paris, elle était aux premières loges pour supporter l’équipe de France de cécifoot, qui a réussi l’exploit de décrocher l’or face à l’Argentine, une équipe composée entièrement de pros. « Quel souvenir ! Quelle émotion ! J’ai assisté à tous leurs matches, ils ont été héroïques. J’étais assise à côté de leurs femmes le soir de la finale, à la fin du match, tout le monde s’est mis à pleurer de joie. » Après avoir réussi l’exploit de terminer premières du tour principal qualificatif à la première Coupe du monde (qui se déroulera aux Philippines du 21 novembre au 7 décembre 2025), en écartant notamment les vice-championnes d’Europe ukrainiennes, les Françaises ont obtenu le droit de disputer le tour élite, dernière étape avant le Mondial, en mars prochain à Besançon. Elles affronteront l’Espagne, première nation européenne et deuxième nation mondiale, la Pologne et la Finlande. Les deux premiers de chaque groupe décrocheront leur billet pour les Philippines.

« Jouer une Coupe du monde, je n’y pense même pas, c’est trop abstrait. J’ai découvert le foot à 15 ans, le futsal à 24 ans, tout va très vite. L’équipe de France, c’est encore tout nouveau, si je ne suis pas appelée les prochaines fois, je ne me formaliserai pas. Il y a beaucoup de bonnes joueuses en France. » Pour elle, son sport coche toutes les cases pour devenir un jour une discipline olympique : il est pratiqué dans le monde entier, spectaculaire, rapide et plébiscité par les jeunes. « On y viendra, il faut être patientes », dit-elle. Et puisque tout semble lui réussir, gageons qu’elle serait du voyage.

Grégoire Remund

Photos: ©Bruno Lévy

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