Alice Finot, tête froide foulée chaude
- L’athlète du CA Montreuil 93, 5e des derniers Mondiaux de Budapest sur le 3000m steeple, est une des premières sportives de Seine-Saint-Denis à s’être qualifiée pour les JO de Paris 2024.
- Etablie à Vigo en Espagne, elle dit avoir choisi le CA Montreuil depuis 2 saisons pour avoir un club « uni et familial » lors de ses retours en France.
- Auteure d’un nouveau record de France en finale des Mondiaux, elle vise maintenant un podium à Paris 2024.
« Quand j’ai commencé l’athlé, mon but n’était pas de devenir professionnelle. Mon but, c’était de connaître mes limites ». Et on peut se demander où sont les limites d’Alice Finot, tant sa progression est constante. 5e des derniers Mondiaux de Budapest sur le 3000m steeple, l’une des plus dures disciplines de la piste, l’athlète du CA Montreuil a une nouvelle fois amélioré son propre record de France. Pour la 5e fois en deux ans ! Elle qui avait ravi à Sophie Duarte la meilleure marque nationale en 9’21’’41, culmine désormais à 9’06’’15… Et on est prêt à parier qu’elle ne va pas s’arrêter là.
« Avec une troisième place en finale qui se situe à 8’58’’, le podium n’était pas accessible cette année. Mais avec une progression linéaire, le bronze pourrait être à ma portée l’année prochaine. C’est en tout cas l’objectif. », détaille cette ingénieure automobile de formation, aux plans d’entraînement aussi millimétrés qu’une chaîne de montage.
Si Alice Finot, à 32 ans, n’en finit plus de performer, c’est peut-être aussi parce qu’elle sait s’économiser. Venue tardivement au professionnalisme – à 30 ans seulement – celle qui conçoit l’athlétisme avant tout comme un moyen de se connaître sait parfaitement alterner temps forts et temps faibles. « J’ai bien sûr hâte d’être à ces JO de Paris, qui se dérouleront à la maison et devant mes proches, mais en même temps je garde la tête froide. Là, je pense surtout à couper et à me reconstruire. Il faut accepter de redescendre pour mieux remonter », explique cette briscarde, qui sait exactement où elle veut aller.
Cette gestion cartésienne, rationnelle, traverse d’ailleurs tout son parcours. Repérée par le Groupe Athlétique Haut-Saônois après des cross scolaires au collège et au lycée, la Montbéliarde aurait pu entrer bien plus tôt dans la carrière. Mais elle a choisi de se laisser le temps, de faire passer ses études d’ingénieure avant. « J’ai toujours pris l’athlétisme d’abord comme une passion, aux côtés d’autres. Mon sport au départ, c’était plutôt l’équitation » En 2016, c’est ensuite l’amour qui lui fait choisir l’Espagne et Vigo, où vit celui qu’elle veut rejoindre. Ce n’est qu’ensuite, sur la piste du Celta Vigo, qu’Alice Finot revient à l’athlétisme, avec la progression que l’on sait.
Le choix du CA Montreuil dans cette équation ? « Je cherchais un club qui me fasse me sentir chez moi à mes retours en France, qui ne sont pas si fréquents. Et le CAM, tout en étant le premier club de France, possède cet esprit de famille et de collectivité que je recherchais », détaille celle qui a participé par deux fois déjà au 1500m des interclubs, dont le club de Seine-Saint-Denis s’est fait une spécialité. Cette année, elle a d’ailleurs remporté avec les Jaune et Bleu leur 19e titre de champions de France, record en cours.
En 2024, Alice Finot l’ingénieure automobile pourrait en tout cas bien être celle qui permet à l’athlétisme français, en berne ces derniers temps, de remettre les gaz (1 seule médaille décrochée aux derniers Mondiaux de Budapest). D’autant qu’elle ne craint pas du tout l’effet public. « J’ai hâte de vivre l’ambiance du Stade de France. Il y en a que ça peut figer, moi je sais que ça va me pousser. Vous savez, j’ai une expérience avec le public qui va crescendo : à Torun en Pologne, quand je fais vice championne d’Europe en salle en plein Covid, il n’y avait que des faux spectateurs dans le public. L’année dernière, aux Mondiaux de Eugene, il y avait beaucoup plus d’Américains que d’Européens. Là, à Budapest, j’ai eu l’expérience d’un vrai public international. Alors, qu’est-ce que ça va être au Stade de France, devant un public acquis aux Bleus ? » Et parmi eux, toute la grande famille du CAM sera là pour supporter l’une des siennes.
Christophe Lehousse