Des collégiens de Gagny à la découverte de la Corée du Sud

Des collégiens de Gagny à la découverte de la Corée du Sud
Éducation
  • En avril dernier, quinze élèves de classes Segpa du collège Théodore-Monod, à Gagny, sont partis dix jours en Corée du Sud.
  • Un voyage organisé dans le cadre de « 130 pays, 130 collèges », un dispositif lancé par le Département qui vise à mobiliser les élèves autour des Jeux olympiques et paralympiques de 2024 et qui résonne encore un an plus tard.
  • Le 6 mai, ils étaient invités à faire le bilan de ce voyage exceptionnel.

« Si on vous a réunis aujourd’hui, c’est pour que vous partagiez votre expérience et que vous nous racontiez si votre voyage a été à la hauteur de vos attentes et des objectifs que vous vous étiez fixés avant de partir », lance Lætitia, animatrice à La Case, une association spécialisée dans les thématiques d’éducation à la citoyenneté et de solidarité internationale. Face à elle, assis en demi-cercle, quinze élèves de classes Segpa (sections d’enseignement général et professionnel adapté) du collège Théodore-Monod, à Gagny, qui ont eu la chance de partir en Corée du Sud dix jours, en avril dernier, dans le cadre de « 130 pays, 130 collèges », un dispositif lancé en 2022 par le Département pour mobiliser les élèves autour des Jeux de Paris 2024. « Il fallait choisir un pays et un sport olympique en lien avec celui-ci. Nous avons opté pour la Corée du Sud et le taekwondo », précise Anthony Viator, porteur du projet et qui enseigne les maths, le français, l’histoire-géo et les arts plastiques aux classes Segpa dudit collège. Si le sport a été une porte d’entrée, les élèves ont eu l’occasion d’élargir leur connaissance sur le pays du Matin calme dans d’autres domaines, comme les arts, à la faveur d’ateliers au Musée Guimet et de visites d’expos au centre culturel coréen à Paris? Ou encore la gastronomie, grâce à des cours de cuisine organisés dans l’enceinte-même du collège.

Quinze élèves du collège Monod à Gagny ont eu la chance de partir en Corée du Sud au mois d’avril grâce au dispositif « 130 pays, 130 collèges ».

« Nous allons faire un jeu », poursuit l’animatrice. Sur une feuille blanche, les élèves doivent compléter les lettres de l’alphabet en écrivant des mots qui leur évoquent la Corée du Sud. Quand soudain, une voix questionne, fébrilement : « Mais, Madame, si on fait des fautes d’orthographe ? » « Aucune importance, là n’est pas l’essentiel », évacue immédiatement l’intervenante. Sans broncher, les collégiens s’exécutent un à un. Certains n’hésitent pas à donner un coup de main aux camarades en manque d’inspiration. « Franchement avec la lettre U, c’est impossible », entend-on à plusieurs reprises. Mais c’était sans compter sur le sens de l’à-propos de Kinosh qui, avec « université », débloque la situation et sera chaudement félicité. Sur l’abécédaire figurent aussi les mots « famille », « maison », « palais », « ravioli » ou encore « touriste ». De Corée, le petit groupe est revenu avec des souvenirs plein la tête mais aussi plein les valises. Ainsi de Smith qui prend fièrement la pose avec son t-shirt à l’effigie de l’alphabet coréen. De Tifany, qui sort de sa poche un billet de 1000 won (63 centimes d’euro). De Japhet, qui expose le ticket de métro qu’il utilisait à Séoul. De Noah, qui exhibe un porte-clef aux couleurs du drapeau coréen. Et même de Juliette Moua, la prof d’anglais qui a pris part au projet et qui a fait le plein de crèmes solaires, très réputées dans ce pays d’Asie.

Balades, visites et échanges interculturels au programme

Si une fois sur place tout s’est passé comme sur des roulettes, les semaines qui ont précédé le départ ont été particulièrement stressantes sur la question des visas. « Nos élèves n’ont pas tous la nationalité française [pour les séjours d’une durée inférieure à 90 jours, les ressortissants français sont dispensés de visa en Corée du Sud, NDLR], ce qui a fait traîner les démarches, il a fallu se battre jusqu’au bout, relève amèrement Anthony Viator. Nous avons alors fait valoir la mobilité de classe mais malheureusement rien n’est prévu à cet effet. » Les encadrants ont aussi reçu l’aide du Service international Via le Monde du Département, qui accompagne les projets d’échanges interculturels.

Au cours de leur pérégrination, les élèves se sont rendus principalement dans deux villes, Séoul, la capitale, et Gwangju, dans le sud-ouest du pays, où les attendait l’équipe du collège partenaire du dispositif. « Gwangju est une ville chargée d’histoire, indique Juliette Moua. Les habitants sont encore très marqués par le massacre perpétré en mai 1980 par le pouvoir dictatorial parce qu’ils avaient osé se soulever contre la déclaration de loi martiale. Nous avons évidemment raconté ce triste épisode aux élèves, qui ont été très marqués. » Devenue un symbole de la lutte pour la démocratie dans le pays, cette ville de la province du Jeolla du Sud est également reconnue en tant que centre culturel et artistique, abritant bon nombre de musées de référence. « Entre la K-pop, les séries télé et la street-food, la culture coréenne a bonne presse chez les jeunes depuis quelques années, rappelle Anthony. Mais c’est un pays qui comporte bien d’autres richesses que nous souhaitions leur faire découvrir. »

Pour les enseignants, le plus important étaient les échanges interculturels. « À l’ère du numérique et des écrans qui polluent notre quotidien, notamment celui des jeunes, nous avons voulu mettre l’accent sur les rapports humains, insiste le prof. Le barrage de la langue a vite été levé grâce aux gestes et à Google trad (rire) mais surtout parce que l’envie de faire connaissance a été plus forte que tout. La plupart des élèves n’avaient jamais voyagé aussi loin et certains d’entre eux n’avaient jamais pris l’avion. »

Des élèves de Théodore-Monod dans les familles de leurs correspondants coréens.

Noah, par exemple, a créé des liens très forts avec son correspondant, qui l’a invité chez lui et lui a fait découvrir les joies du baseball, sport roi en Corée du Sud. « Pour entrer dans sa maison, il faut franchir trois portes et composer 10 000 codes, là-bas tout est hyper sécurisé, j’étais trop surpris », raconte l’ado. Tifany, elle, a été impressionnée par l’hygiène, le respect des codes de conduite (« personne ne traverse tant que le feu n’est pas vert, même s’il n’y a aucune voiture en vue ») et sur le fait que rien ne dépasse et que tout est organisé au millimètre près. « Dans l’hôtel où on résidait, on laissait nos chaussures en bazar devant les portes. Quand on revenait, le soir, elles étaient toutes soigneusement disposées deux par deux », s’étonne la jeune fille. Samy, lui, se souviendra de ce voyage toute sa vie. Son unique expérience à l’étranger avait été jusqu’ici l’Algérie, le pays d’origine de ses parents. « La nourriture, quand elle n’est pas trop épicée, est vraiment trop bonne et savoureuse. C’est dans les familles qu’on a le mieux mangé », rapporte-t-il.

Des souvenirs consignés dans les archives du collège

Si la plupart avaient déjà entendu parler de la Corée du Sud par le biais de sa pop culture et de ses séries au succès international comme Squid Game ou All Of Us Are Dead, aucun ne s’attendait à y mettre un jour les pieds. « Ce voyage leur a permis de se rendre compte de l’importance de certaines matières comme l’anglais pour communiquer à l’étranger, les maths, pour calculer un budget sur une durée déterminée, et le français, pour formuler par écrit ce qu’ils ont vécu sur place, autant de précieux souvenirs qui seront conservés dans les archives du collège et dans le PPFO (projet personnalisé de formation et d’orientation), un classeur dans lequel on retrouve les activités effectuées par les élèves de Segpa de la 6e à la 3e », souligne Anthony.

La journée touche à sa fin mais avant cela, l’animatrice de La Case propose un dernier exercice. Sur des post-it de couleur, elle demande à chaque participant d’écrire les points et événements du séjour, tant sur la rencontre avec la population que sur la vie en groupe, qui ont provoqué chez eux un sentiment de gêne, de joie et de surprise. Et Samy de s’exécuter aussitôt. « La gêne, je l’ai ressentie quand on a fait une initiation de taekwondo devant 200 personnes. La joie quand on a fait connaissance par hasard avec un Coréen qui avait vécu à Marseille et qui parlait français. Et la surprise quand j’ai découvert que leurs toilettes étaient hyper modernes. Vous vous rendez compte, les sièges étaient chauffants ! » Éclats de rire dans la salle.

Grégoire Remund

Photos: ©Bruno Lévy et DR

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