La cuisine centrale d’insertion Label Gamelle sort l’objectif

La cuisine centrale d’insertion Label Gamelle sort l’objectif
Exposition photo
  • Depuis 2020, la cuisine d’insertion Label Gamelle livre en plats cuisinés des centres d’hébergement d’urgence d’Ile-de-France, employant pour cela 20 salarié·e·s en insertion.
  • Du 2 au 30 avril, cette entreprise d’insertion expose gratuitement des portraits de ses salarié·e·s à l’Hôtel du Département.
  • Humains et colorés, ces « Diptyques » signés de la photographe montreuilloise Sophie Loubaton donnent à voir le travail réalisé par des personnes souvent invisibilisées par notre société.

« Ici, je me sens utile socialement. Et cette exposition, c’est une manière de le montrer. » Sabrina, 38 ans, est encore en blouse blanche et charlotte sur la tête quand elle nous répond. Voilà un an et demi que la jeune femme travaille chez Label Gamelle, un traiteur d’insertion à Montreuil qui livre en plats cuisinés des centres d’hébergement d’urgence ou des foyers de l’Aide Sociale à l’Enfance, à des prix modiques. Suivant le slogan de Label Gamelle : « ce n’est pas parce qu’on est pauvre qu’on doit mal manger. »

Pour produire 1500 repas qui quittent chaque jour la cuisine centrale basée à Mozinor, une ruche d’entreprises à Montreuil, 20 salariés en insertion – provenant souvent des centres d’hébergement que Label Gamelle approvisionne – se lèvent chaque jour pour cuisiner, découper, mijoter, mettre en barquette. Ce sont leurs visages que cette Société coopérative d’intérêt collectif (SCIC) a décidé de mettre en valeur à travers une exposition photo, accrochée pendant un mois dans la salle des pas perdus de l’Hôtel du Département à Bobigny.

1500 repas produits par jour

« A travers cette expo, j’ai eu envie de passer un message militant, souligne Christine Merckelbagh, co-fondatrice de Label Gamelle. Pour moi, ces visages, c’est la richesse du 93, des gens d’un grand courage qu’on applaudissait pendant le confinement et qu’on a rapidement oubliés ensuite. Qui sait que la plupart viennent de loin, avec parfois une heure et demie pour venir bosser? Pour moi, cette expo, c’est aussi une manière de répondre à toutes les lois immigration qui sont prises actuellement en Europe. »

« Diptyques » – le nom de l’exposition – choisit de nous montrer ces 28 personnes (à côté des salariés en insertion, certains membres de l’encadrement sont aussi présents) sous l’angle de leur travail mais aussi au-delà, dans leur vie de tous les jours.

« On a pris cette option parce qu’on voulait montrer leur épaisseur. La vie, bien sûr, c’est le travail, mais ça ne définit pas entièrement les gens. Montrer aussi leurs passions, leurs rêves au-delà du boulot, c’était les humaniser encore davantage », explique Sophie Loubaton, la photographe montreuilloise qui aura conduit ce travail.

Fierté et engagement

A partir du 2 avril, on découvrira donc en 90 cm x 90 les regards de Milad, jeune homme passionné par les livres mais qui n’en avait plus depuis son départ précipité d’Afghanistan, Séphora, jeune Ivoirienne énergique ou encore Amoro, qui en dehors du boulot entraîne des jeunes au foot.

A côté de leurs visages, des objets ou des détails incrustés viennent rappeler subtilement quelques aspects de leurs parcours de vie. Des nuages évoquent les difficultés rencontrées, dans des parcours migratoires qui ont parfois été traumatisants. Des oiseaux symbolisent au contraire l’espoir, bien présent dans les yeux de Loomita, Taher ou Sayed.

« C’est un plaisir et une fierté de se voir exposée », dit Al-Mas, habitante de Rosny, qui ne manque jamais d’écouter de la musique éthiopienne pour transmettre sa culture à sa fille de 6 ans.

Pour Hamed, ces photos seront aussi « un souvenir des collègues », puisque ce Libyen en poste depuis 1 an et demi, s’apprête à changer d’emploi. Comme toutes les entreprises d’insertion, Label Gamelle a en effet pour fonction de redonner confiance à des publics éloignés de l’emploi avant qu’ils ne revolent de leurs propres ailes. « Nous avons 85 % de sorties positives », rappelle Christine Merckelbagh, ce terme désignant les personnes qui sont en emploi ou en formation après être passées par une structure d’insertion.

Pour Hamed et Kamel, autre salarié en insertion, la suite prendra la forme d’un emploi dans une crèche départementale, comme employés polyvalents. « Je vais coudre, repasser, faire la vaisselle, mais je ne vais pas abandonner la cuisine, et ça, ça me plaît », explique Hamed, qui aura fait des progrès impressionnants en français en l’espace de quelques mois, lui qui vit en colocation grâce à l’association Caracol (qui prend en gestion des bâtiments vacants et y installe des colocations).

Sabrina, en CDI à Label Gamelle, viendra elle probablement le 2 avril avec ses deux garçons de 11 et 7 ans, curieux de son travail. Dans ses yeux, on lit de la retenue mais aussi beaucoup de fierté.

Christophe Lehousse

Photos: ©Sophie Loubaton

– Exposition « Les Diptyques de Label Gamelle », du 2 au 30 avril

1 esplanade Jean-Moulin à Bobigny

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Tous les commentaires1

  • Chafia AYATE

    Bonjour,
    Très belle initiative et projet valorisant et valorisé par de belles personnes

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