L’ALI, l’allié pour trouver un travail

L’ALI, l’allié pour trouver un travail
Insertion
  • Le Département de la Seine-Saint-Denis a renforcé ses moyens pour aider les personnes au RSA à trouver un travail. Grâce à son service social et à ses 22 agences locales d’insertion (ALI) il réussit à révéler le potentiel des allocataires et à ouvrir les portes des entreprises.
  • Mais qu’est-ce qu’une Agence locale d’insertion (ALI) ? Quelles aides, quel accompagnement apporte-t-elle ? Y trouve-t-on vraiment un travail ?
  • Florence Martin-Chauffier, directrice de l’ALI d’Aubervilliers, nous explique le fonctionnement de sa structure et son esprit. 

Comment pouvez-vous aider une personne au RSA ?

Lorsqu’on reçoit une personne au RSA la première fois, on réalise un diagnostic. On retrace avec elle les moments importants de son parcours. On étudie sa situation aujourd’hui, où elle en est. Et puis on identifie les sujets sur lesquels on va pouvoir l’aider : tous les freins périphériques possibles. On regarde beaucoup la santé, parfois il y a des sujets de handicap, la mobilité, le niveau de qualification, le niveau de français. Sur notre territoire, il y a beaucoup de personnes qui ont un petit niveau de français. Il s’agit d’un vrai frein dans la vie quotidienne, dans la vie sociale et bien sûr pour l’insertion professionnelle. Il y a la garde d’enfants aussi car. Il y a beaucoup de familles monoparentales, beaucoup de mères seules. La personne peut avoir confiance en nous car on va pouvoir l’aider sur ces sujets.

 

Combien de temps peut durer votre accompagnement ?

Nous pouvons les accompagner jusqu’à 2 ans. Nous expliquons aussi aux personnes qui viennent nous voir qu’il y a des démarches qui vont être longues mais qu’on va être là pour les accompagner. C’est le cas avec le logement qui nécessite toujours un accompagnement de très longue durée où on ne peut pas espérer trouver une solution en un mois.

 

Comment réussissez-vous à avancer sur ce sujet précis du logement malgré la crise ?

Sur beaucoup de choses, on s’aide de partenaires, notamment sur le logement. On a un partenaire qu’on aime beaucoup qui s’appelle Objectif logement. Il nous a beaucoup aidés dans les démarches de base, mais aussi en intervenant dans des procédures d’expulsion. Ils nous ont aidé à obtenir de vraies réussites pour les bénéficiaires.

 

Avec quels autres partenaires travaillez-vous ?

On travaille avec les partenaires du territoire. On travaille avec le CCAS (centre communal d’action sociale). A la mairie, il y a même un service Droit des Etrangers, qui s’occupe des sujets de type « titre de séjour ». Ils nous aident beaucoup. Sur toute la partie santé psychique, on travaille avec Iris Messidor. Sur le handicap, on commence à travailler avec un partenaire du département qui s’appelle Unirh.

 

Quelle qualité doit avoir un projet professionnel pour aboutir ?

Le projet professionnel doit être satisfaisant pour la personne et il doit être réaliste. Cet après-midi, vous allez voir l’atelier Explorama. C’est justement un travail sur le projet professionnel où on va montrer aux personnes sous forme d’images, de photo-langage, plein d’univers professionnels pour voir dans lequel elles peuvent se projeter. Elles ont des aspirations qu’il faut écouter. Leur projet professionnel peut avoir des liens avec ce qu’ils ont fait par le passé. Parfois aussi, il faut faire le deuil aussi de ce qu’on espérait, quand on s’est construit une idée d’un projet pendant des années, qu’on arrive en France et qu’on se rend compte que les compétences qu’on a acquises dans son pays, ne sont pas si facilement transférables. Mais à l’ALI nous pouvons accompagner les personnes dans la reconnaissance de leur diplôme étranger, grâce au centre Eni Naric.

 

Peut-on parler d’un accompagnement personnalisé ?

On doit en aider certains à reprendre confiance. Quand on leur demande ce qu’ils ont fait avant, ils nous répondent : « – bah non, je n’ai jamais travaillé », on leur dit « – mais dans votre pays avant vous avez travaillé ? » « – Oui j’ai travaillé, mais ce n’est pas intéressant d’en parler. » « – Mais si c’est hyper intéressant d’en parler, qu’est-ce que vous avez fait ? Peut-être que vous n’avez pas été rémunéré comme un salarié parce que ce n’est pas comme ça que ça marche dans votre pays d’origine. Peut-être que vous avez fait de l’informel où vous avez développé plein de compétences, plein de savoir-faire. » Il faut aller creuser tout ça.

 

A quelles compétences en particulier pensez-vous ?

Parfois les personnes ont beaucoup aidé dans leur environnement familial. Par exemple, elles se sont occupées d’enfants mais elles trouvent que ce n’est pas intéressant d’en parler. On leur dit que ces compétences sont transférables en France. Donc il faut prendre le temps de créer cette confiance, de faire parler les gens, tout ce qu’ils ont pu faire avant pour leur faire identifier tout ce qui est intéressant. Et en plus ça leur fait reprendre confiance parce qu’on leur dit : « Mais vous voyez ! Vous avez plein de choses, pourquoi vous n’en parlez pas ? » Parfois, ils nous arrivent avec des CV où il y a des trous. Et au fur et à mesure, on se rend compte qu’ils ont plein d’expériences intéressantes. Donc, il faut valoriser tout ça. C’est un travail de patience.

 

Quel niveau de français est nécessaire pour trouver un travail ?

J’ignore pourquoi beaucoup d’employeurs pensent que pour bien comprendre les consignes d’un manager et pour bien s’intégrer dans une équipe, il faut parler très bien français. En fait, il existe une échelle pour évaluer le niveau de français. Très souvent les recruteurs demandent un niveau appelé B1 ou B2 pour réaliser parfois des tâches à petit niveau de qualification comme du nettoyage. Notre rôle, à nous acteurs de l’inclusion, c’est d’essayer de faire comprendre qu’en fait ce n’est pas très grave d’avoir un petit niveau de français. Ce sont des personnes en général hyper motivées, débrouillardes, qui se sont battues pour arriver ici et ont développé plein de solutions pour se débrouiller malgré leur niveau. C’est un des gros axes de travail. Les personnes arrivant en France, suivent des cours de français de l’Ofii (Office Français de l’Immigration et de l’Intégration). Il y a plein de personnes qui s’arrêtent là, ce qui est absolument insuffisant pour pouvoir s’intégrer dans la vie quotidienne, pour faire ses courses et pour entreprendre des démarches. D’autre part souvent les personnes sont en situation d’illectronisme alors que maintenant il faut maîtriser toutes les démarches en ligne. Notre travail consiste très souvent à redonner des cours de français à des personnes et à les aider à apprendre à se servir des outils numériques en les accompagnant.

 

La langue est-il le seul prérequis ?

Les personnes sont souvent pressées de travailler, alors qu’en fait, il y a un certain nombre d’étapes à faire d’abord. Comme l’amélioration du niveau de Français, la reprise du rythme, la capacité à se présenter avec confiance à un recruteur -l’image qu’on projette, c’est hyper important- le respect des règles du travail, le fait d’être ponctuel, de devoir respecter les directives d’un manager. La manière de fonctionner avec des collègues. Quand les personnes n’ont pas travaillé depuis très longtemps, Il faut réapprendre tout ça. Et c’est là que l’insertion par l’activité économique fonctionne bien. En fonction de la situation des personnes, elles peuvent aller soit vers un chantier d’insertion, soit vers une entreprise d’insertion.

 

Vous avez un peu plus d’un an d’existence, pouvez-vous nous donner un exemple concret de parcours réussi dans votre ALI ?

Je pense à une des premières personnes qu’on a accompagnées ici. Une dame qui n’avait pas travaillé depuis au moins 20 ans. Elle avait eu un enfant. Elle s’en était occupé. Puis, elle s’était séparée. Elle n’avait pas réussi à retrouver un travail. Et elle avait perdu confiance en elle. Une des premières choses qu’elle nous a dit, c’est qu’elle s’intéressait aux métiers d’assistante administrative. Elle l’était à l’époque. Mais elle ne savait plus se servir d’un ordinateur. Elle ne connaissait ni Word, ni Excel. Pour retravailler toutes ces bases, on savait que le travail serait plus long. Elle nous avait aussi parlé de son BEP dans les métiers du paysage et du fait qu’elle aimait bien aussi travailler dehors. Nous lui avons proposé de participer à un chantier d’insertion qui s’appelle Halage. Ça s’est super bien passé tout de suite. Elle a pris beaucoup de plaisir à faire des bouquets. Elle a retissé des liens avec d’autres personnes. Elle travaillait dehors toute la journée. C’était une dame qui avait hyper peu confiance en elle en arrivant à l’ALI. On la voyait : elle était très refermée, elle parlait peu. Très vite, elle s’est épanouie.

 

Crédit photo : Bruno Lévy

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