Cycl’Avenir (re)met en selle les habitantes
                    - L'association Cycl'Avenir forme actuellement plus de 70 Séquano-Dionysiennes en situation de précarité, à l'usage du vélo.
 - Une douzaine de participantes, accompagnées par des animateur·rices, se sont récemment élancées à bicyclette du Pré-Saint-Gervais à la Villette.
 - Une façon de renforcer sa confiance en soi et de gagner en autonomie dans l'optique de (re)trouver un emploi.
 
Casque sur la tête et chasuble jaune sur le dos, Zohra vérifie le frein avant et le dérailleur arrière de sa bicyclette. Conseillée par Bétania et Boris, deux bénévoles de la structure, la trentenaire se prépare avec la petite équipe du programme En S’Elle(s) ! de l’association Cycl’Avenir avant de pédaler du quartier des Sept Arpents au Pré Saint-Gervais jusqu’au parvis de la Grande Halle de la Villette. Pendant trois heures, les douze participantes, toutes habitantes de la commune, tentent d’améliorer leur maîtrise du vélo sous les conseils des coachs de l’association.
La mobilité comme outil d’émancipation
Ce jeudi-là, Waheba monte doucement sur sa petite reine puis pose prudemment les mains sur le guidon. Elle positionne les pieds sur les pédales avant de s’élancer avec un sourire un peu angoissé sur la route. D’abord hésitante, la quadragénaire s’arrête plusieurs fois après avoir suivi le groupe pour prendre de l’assurance. « Je suis fière d’être maintenant capable de faire du vélo » confie la mère de famille qui, il y a quelques mois encore, n’était jamais montée sur une selle. « Aujourd’hui, je me déplace plus facilement par exemple en prenant la bicyclette pour faire mes courses, je suis moins dépendante des transports en commun… ».
La quadragénaire, qui a suivi une demi-douzaine de sessions d’apprentissage avec l’association, a passé récemment un test d’habileté qui lui permettra d’acheter à l’association un « pack solidaire » composé d’un vélo et son équipement (casque, protections, panier devant le guidon…) pour un montant de 25 euros. Orianne, éducatrice pour la mobilité à vélo, multiplie les conseils avant et pendant le périple sur le gonflement des pneus, l’installation du siège enfant ou l’intérêt de lever la tête pour rouler droit.
« Le vélo offre à ces dames de petites réussites quotidiennes, plus de liberté pour aller travailler, faire les courses, chercher les enfants à l’école » explique Bétania, bénévole amoureuse de la « petite reine » qui accompagne le petit groupe. « On cherche à les rassurer, les initier aux règles de circulation et aux questions d’intermodalité ». Un dévouement que Waheba a voulu saluer en partageant à la fin d’un périple, avec Zohra, Narjes, Oréba… et les animateur·rices, des baklavas et autres cornes de gazelles préparés par ses soins.

Une initiative soutenue par le Département
La Seine-Saint-Denis, qui a permis l’aménagement de 47 km de pistes cyclables depuis 2021, a subventionné cette structure dans le cadre d’appels à projets visant à favoriser l’insertion socio-professionnelle de femmes en situation de précarité et / ou éloignées de l’emploi. Les participantes au programme En S’Elle(s) sont orientées vers ce collectif par des acteurs de la solidarité comme les circonscriptions de service social, les régies de quartier ou associations comme Emmaüs ou ici le café associatif du Pré Saint-Gervais. Elles sont accompagnées pendant 7 mois à raison de séances hebdomadaires de 3 heures, un parcours global qui s’achève par une balade de Paris à vélo sur une thématique culturelle, guidée par un·e professionnel·le du tourisme.
« Depuis sa fondation en 2020, Cycl’Avenir a formé dans le cadre de ce dispositif plus de 500 femmes en Île-de-France, dont une grande partie est originaire de Seine-Saint-Denis » explique Maryline Robalo, directrice de l’association. « Nous travaillons avec les Villes et cette année, nous avons accompagné plusieurs groupes d’une douzaine de cyclistes à Noisy-le-Grand, Neuilly-Plaisance, Neuilly-sur-Marne, Villetaneuse… soit plus de 70 personnes. On met à disposition un salarié ou un bénévole pour garder les enfants des adhérentes pendant les séances afin qu’elles aient l’esprit libre ».
Les participantes réussissent à 90% le test d’habileté à la conduite à vélo en fin de leur parcours et la très grande majorité d’entre elles acquièrent ensuite un vélo à un tarif avantageux grâce à ce projet. L’association, qui coache également les familles ou les scolaires et décerne le brevet d’éducateur Mobilité à vélo va ouvrir des locaux dans le quartier Langevin à Villetaneuse. En attendant, sa directrice fourmille de nouveaux projets. « On va monter des actions auprès des enfants ou pour aider les mécaniciens de rue à se former à la mobilité durable… ». C’est tout le bien qu’on souhaite à ce collectif qui a compris que l’insertion et la qualité de vie passent aussi par les transports.

Crédit-photo : Nicolas Moulard