L’épopée du Sausset racontée par sa conceptrice

- Claire Corajoud, paysagiste et conceptrice, avec son mari Michel, du parc départemental du Sausset, va donner son nom à la Maison du parc.
- Après avoir remporté le concours de création, elle est intervenue pendant près de 40 ans sur ce parc situé entre Aulnay et Villepinte.
- Dans les années 70, cette Parisienne de naissance a défendu une vision écologiste avant l’heure, centrée sur le retour de la nature en ville.
« Ce qui me rend le plus fière, ce sont les retours des gens. Quand je les vois à l’aise dans ce parc, je me dis qu’on a rempli notre mission » Claire Corajoud n’est pas du genre à se mettre en avant. Pourtant, que la Maison du Parc, soit renommée d’après elle, cela lui fait évidemment plaisir.
Il faut dire qu’ils en ont passé du temps, elle et Michel Corajoud, au Sausset, à voir le parc émerger tranche après tranche. Car leur mission ne s’est pas cantonnée à la livraison du lieu, en 1981, après que ce couple, associé à une équipe d’architectes, eut remporté le concours d’idées. Non, ce parc, ils l’ont accompagné au fil des années, créant ici une forêt, là une zone de bocage. « L’endroit où j’ai sans doute le plus travaillé, c’est le bocage, en collaboration d’ailleurs avec les services du parc. Il y a 3 ans, j’intervenais encore sur la zone du Puits d’enfer, côté Villepinte, où il y a désormais une vigne », raconte Claire Corajoud, âgée de 80 ans.
Au commencement en tout cas n’était pas l’herbe. « Avant, il n’y avait que des champs de blé et de betterave, et une gare RER posée étonnamment en plein milieu. Ce qu’on a voulu faire, c’est se servir de la très bonne terre qu’il y avait sur les lieux, ce qui était assez rare pour des projets de ce type. Très vite, on a donc eu un espace forestier et en face d’Aulnay un parc urbain », détaille encore Claire Corajoud.
Mu par la volonté de faire naître des parcs à proximité de zones urbaines denses, le Département acquiert en effet à la fin des années 70 les surfaces maraîchères qui se trouvent dans la zone d’activités autour de la gare RER de Villepinte soient 200 hectares, une surface conséquente. A l ‘époque, hormis le parc de la Poudrerie et le parc Georges-Valbon en cours de création, il n’existe pas d’espace de cette importance en Seine-Saint-Denis.
Une approche tournée vers le vivant
« 200 000 plants d’arbres forestiers ont été plantés en une année pour mettre en place la trame du parc, essentiellement des espèces endémiques. Tout cet écosystème de forêts et de prairies naturelles était assez en avance sur son temps. On peut parler d’écologie avant l’heure », resitue Vincent Gibaud, l’actuel chef de service du Parc du Sausset, arrivé en 2003.
« Avec mon mari (disparu en 2014), on se complétait bien : lui, formé à l’Atelier d’Urbanisme et d’Architecture, avait une vision assez urbaine, moi venue de l’Ecole du paysage de Versailles, je défendais plus la nature en ville », explique ainsi Claire, connue par ailleurs pour avoir redessiné les quais de Bordeaux ou de Lyon. « Michel Corajoud avait une approche d’urbaniste. Claire a une approche plus sensible, plus tournée vers le vivant », ajoute Vincent Gibaud.
Autre trait caractéristique de la méthode Corajoud : le dialogue. En 40 ans, le parc a en effet évolué en symbiose avec la Direction des parcs du Département et les collaborations sont fréquentes. Le marais attenant à l’étang de Savigny naît ainsi d’un travail avec la Direction de l’Eau et de l’Assainissement. Et Vincent Gibaud se souvient aussi avoir travaillé longuement avec Claire Corajoud sur le réempierrage des voies à travers la forêt.
Un des motifs de fierté du couple Corajoud et de tout le service du parc sera notamment, en 2010, le classement du parc en zone Natura 2000, grâce notamment au marais où chaque printemps et été viennent nicher des oiseaux migrateurs.
Christophe Lehousse
Photos: ©Jean-Louis Bellurget
©Nicolas Moulard sauf photo de Une