La Seine-Saint-Denis, berceau d’Emmaüs

La Seine-Saint-Denis, berceau d’Emmaüs
Histoire
  • De 1947 à 1954, toutes les premières fois de l’abbé Pierre ont lieu en Seine-Saint-Denis.
  • L'abbé Pierre, une vie de combats réalisé par Frédéric Tellier retrace la vie du fondateur d'Emmaüs et sort en salle mercredi 8 novembre.
  • Retour sur l’épopée d’une des personnalités préférées des Français·e·s.

La première communauté Emmaüs est née à Neuilly-Plaisance, les premières cités d’urgence à Neuilly-sur-Marne et les pre- mières cités de logements sociaux à Bobigny, Aulnay-sous-Bois, Le Blanc-Mesnil…

L’histoire d’Emmaüs commence en Seine-Saint-Denis en octobre 1947. D’abord à Neuilly-Plaisance, au 38 avenue Paul-Doumer. Malgré le piteux état de cette maison, «les champignons qui poussaient sur le plâtre des murs aux papiers arrachés, l’eau qui suintait et descendait du toit directement par des fentes », l’abbé Pierre s’y installe avec sa secrétaire, Lucie Coutaz. En quelques mois, ils la rénovent pour en faire une auberge de jeunesse. Ils disposent ainsi d’une quarantaine de couchages, d’un réfectoire, d’une cuisine et d’un jardin potager, pour accueillir étudiants, ouvriers, scouts et séminaristes.

Il baptise la bâtisse « Emmaüs », comme le village où est apparu le Christ ressuscité, à ses apôtres. Ici, on aide chacune et chacun sans faire de différence aucune, quels que soient sa nationalité, ses convictions politiques, religieuses ou son parcours de vie. Pour offrir l’hospitalité à toujours plus de monde, l’abbé Pierre et ses compagnons-bâtisseurs bricolent une maison en bois accolée à la maison :

« Si tu n’as plus rien à faire de ta vie, confie-la moi, je ne peux pas t’aider, mais toi, tu peux m’aider à aider » dit-il à chacun.

Les premières cités d’urgence à Neuilly-sur-Marne

En décembre 1949, l’abbé Pierre apprend qu’une famille vient d’être expulsée en plein hiver. Il la recueille dans sa propriété de Neuilly-Plaisance. En 1950, il décide d’acheter un terrain du nom de Champs-Fleuris pour lui construire une maison avec l’aide de ses compagnons. Face à la crise du logement qui sévit après-guerre, l’abbé Pierre cherche toujours à convaincre ses homologues députés de la nécessité de créer des cités d’urgence. En attendant, c’est à Champs-Fleuris à Neuilly-Plaisance, puis en 1951 cité des Coquelicots à Neuilly-sur-Marne, qu’il installe ses camps de secours où de plus en plus de familles pauvres, sans toit, finissent par élire domicile.

Récup’, chiffonniers et biffins

En 1951, il donne sa démission du Parlement et est à court d’argent. Un compagnon de la 1ère heure, Auguste Legall lui donne l’idée de récupérer matières premières et objets d’occasion pour les revendre. Des activités de biffins qui nécessitent d’ouvrir un second lieu appelé « la Réserve » où est aujourd’hui encore installée la communauté Emmaüs de Neuilly-sur-Marne.

L’hiver 54, le plus rigoureux

Pour financer davantage de cités de première nécessité, l’abbé Pierre demande que soit débloqué un milliard d’anciens francs. Au moment où est rejeté l’amendement déposé à l’Assemblée nationale par Léo Hamon, le petit Marc, trois mois, décède dans une vieille carcasse d’autobus où il dort avec ses parents. L’abbé Pierre interpelle alors le gouvernement : « Monsieur le Ministre, le petit bébé de la cité des Coquelicots, […] mort de froid dans la nuit du 3 au 4 janvier, pendant le discours où vous refusiez les « cités d’urgence », c’est à 14 heures, jeudi 7 janvier, qu’on va l’enterrer. Pensez à lui. Ce serait bien si vous veniez parmi nous à cette heure-là. On n’est pas des gens méchants… » Le ministre est présent à son enterrement mais moins d’un mois plus tard, un autre décès survient. Une femme est retrouvée morte de froid à Paris, boulevard de Sébastopol. On venait de l’expulser. L’abbé Pierre improvise son célèbre appel à la solidarité à la radio. « Mes ami·e·s, au secours… » Son discours devient le symbole du combat pour le droit au logement. Un plan d’urgence de 10 milliards est alors lancé pour construire 12 000 logements de première nécessité.

C’est ainsi qu’en 1954, la compagnie de l’abbé Pierre édifie des cités d’urgence à Bobigny, Pantin, Aubervilliers, Le Blanc-Mesnil, Aulnay-sous- Bois… avec des logements sommaires, qui s’avèrent rapidement obsolètes. Parallèlement à ces cités d’urgence, les architectes Georges Candilis, élève de Le Corbusier, Émile Aillaud, Ganziarek, Gun- ther imaginent les toutes premières cités de logements sociaux avec cuisine équipée et placard dans chaque chambre. Cité Pierre-Montillet, cité Nouvelle (cité de l’Europe), cité de l’Étoile-Emmaüs où vivent encore de nombreuses familles aujourd’hui.

Découvrez la bande-annonce de L’abbé Pierre, une vie de combats de Frédéric Tellier :

Tous les commentaires2

  • BOLAY ANNICK

    L’abbé Pierre était un saint. Coluche a essayé d’aider les plus démunis en créant les restos du coeur. A l’heure actuelle, la misère est toujours présente. L’abbé Pierre doit se retourner dans sa tombe en voyant que rien n’a changé.

    • GRIOUX LILI

      La misère mondiale est de plus en plus prégnante. La classe ouvrière a disparu et la classe moyenne est en train de disparaître. Par endroit, on se croirait revenu au début du XXe siècle, avec les bidonvilles autour de Paris. Les familles de réfugiés sont de plus en plus nombreuses à dormir dans les rues, par tous les temps… Ah, il est beau le XXIe siècle… Comme le dit votre commentaire, l’Abbé Pierre doit se retourner dans sa tombe. Rien n’a changé… Et au vu du contexte géopolitique et géo climatique, cela va aller de mal en pis.
      Malgré tout, il faut rester positif et se battre encore et toujours comme il l’a fait, en gardant toujours une lueur d’espoir sur l’Humain, malgré les violences en tout genre qui nous entourent.

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