Dessine-moi Antoine de Saint-Exupéry au Musée de l’Air et de l’Espace
- Jusqu’au 29 septembre, posez-vous donc au Musée de l’Air et de l'Espace du Bourget pour visiter la belle exposition sur Antoine de Saint-Exupéry, écrivain et aviateur.
- Elle commémore le 80e anniversaire de la mort du pilote, lors d'un vol de reconnaissance.
- Vous y découvrirez notamment les vrais débris de son appareil, repêchés en 2003 au large de Marseille.
« Le repos, je le trouverai ou dans vos bras et sous nos arbres et dans la paix de votre poésie, lorsque je reviendrai de onze mille mètres, ou bien dans un sommeil définitif mais tout lavé de la saleté de leurs injures » Voilà ce qu’écrit Antoine de Saint-Exupéry fin juin 1944 depuis la Sardaigne à son grand amour, Consuelo Suncin, restée aux Etats-Unis. Un mois plus tard, plus exactement le 31 juillet, c’est malheureusement la deuxième issue qui devait s’imposer pour le pilote de guerre, porté disparu ce jour-là au cours d’une mission de reconnaissance.
Le Musée de l’Air et de l’Espace revient sur la destinée à la fois haute en couleur et tragique d’Antoine de Saint-Exupéry à travers une exposition présentant certains de ses objets personnels – carnets de bord, vêtements d’aviateur et manuscrits – mais aussi certains des débris de la carlingue de son Lightning P38.
Avant toutefois d’en arriver à ce climax, on assiste aux débuts d’Antoine de Saint-Exupéry comme pilote.
L’auteur de « Courrier Sud » ou de « Vol de Nuit » fait sa formation de pilote en 1921 pendant son service militaire à Neuhof, dans la banlieue de Strasbourg. Encore indécis sur ce qu’il souhaite faire de sa vie, il trouve finalement à la fois sa voie dans l’aviation et l’écriture.
L’année 1926 signe la réalisation d’un rêve de gosse pour lui : il entre à l’Aéropostale, ex-Latécoère, ce service de poste aérienne dont les pilotes sont à la fois de grands voyageurs et des casse-cou notoires.
Parti du Bourget en 1935, il se crashe dans le désert
La preuve en 1935 : aventurier au goût de records comme Mermoz ou Nungesser, Saint-Exupéry veut lui aussi son fait d’armes. Avec André Prévot, son mécanicien, ils s’embarquent ainsi à bord d’un Caudron-Simoun dans un Paris-Saïgon à réaliser en moins de 4 jours. Mais la mission, dont le départ se fait d’ailleurs du Bourget, tourne court : les deux hommes se crashent au milieu du désert libyen et doivent la vie sauve à des Bédouins, qui les empêchent de mourir de soif. Selon la légende, les hallucinations qu’aurait alors connu Saint-Ex sont la matière première du Petit Prince, qui naîtra sous sa plume en 1943.
L’entre-deux guerres est aussi pour cet humaniste le temps de la création, littéraire, puis cinématographique : quelques belles affiches de « Vol de Nuit », adapté au cinéma par les Américains en 1933, puis « Anne-Marie » sont elles aussi exposées.
Puis vient le temps de la guerre : malgré ses 43 ans, le pilote, exilé aux Etats-Unis, parvient à se faire enrôler comme pilote de reconnaissance. Ses missions : prendre des photos aériennes qui indiquent les positions ennemies et les forces en présence. C’est aussi le but de sa mission du 31 juillet 1944. Parti de Bastia-Borgo à bord d’un Lightning P-38, un avion de fabrication américaine, reconnaissable entre mille à sa double queue, le pilote de l’escadrille II/33 doit prendre des photos pour préparer le Débarquement allié en Provence (qui aura bien lieu le 15 août).
Mais alors que son retour est attendu pour 12h15, il ne rentrera jamais. Dans les journaux de l’époque, c’est la consternation. Pendant des années, il plane un mystère quasi total sur sa disparition. Mais en 2003, une exploration des fonds marins au large de Marseille a lieu après qu’une gourmette portant le nom du poète avait déjà été retrouvée devant l’Ile Riou. Banco : les plongeurs tombent à 80m de fond sur des restes de l’avion de Saint-Exupéry. Dont on peut donc voir au Musée de l’Air une des jambes d’atterrissage et un turbocompresseur. Dans un film très détaillé, l’équipe du Musée explique comment elle a travaillé en partenariat avec l’Université de Lorraine pour parvenir à restaurer ces pièces passablement corrodées après 60 ans passées dans les eaux salées de la Méditerranée.
L’homme qui tutoyait les cieux nous dit au revoir lui-même, en lisant le début de son beau récit « Terre des hommes » : « La terre nous en apprend plus long sur nous que tous les livres. Parce qu’elle nous résiste. L’homme se découvre quand il se mesure avec l’obstacle. Mais, pour l’atteindre, il lui faut un outil. (…) Le paysan, dans son labour, arrache peu à peu quelques secrets à la nature, et la vérité qu’il dégage est universelle. De même l’avion, l’outil des lignes aériennes, mêle l’homme à tous les vieux problèmes. »
Christophe Lehousse
– Antoine de Saint-Exupéry, Fragments d’histoire. Jusqu’au 29 septembre. 17 euros l’entrée pour tout le musée, 14 euros tarif réduit, 6 euros de 4 à 18 ans, gratuit tous les 1ers dimanches du mois
Fermé le lundi.