SeyB Art, le graffeur enchanteur
Originaire de Montreuil, SeyB a peint de somptueux décors oniriques sur des murs aveugles en Seine-Saint-Denis, puis dans les grandes villes françaises et européennes. Aujourd’hui graffeur professionnel, il retrace son parcours quelque peu agité au milieu des centaines de bombes qui tapissent son atelier. Portrait d’un artiste généreux et éclectique.
« Je prépare une fresque dans un parc représentant un cimetière celte dans la pénombre traversé par un cerf enveloppé de lumière » explique SeyB (prononcez « Seibi ») avec l’enthousiasme d’un adolescent. « Mon objectif, c’est d’offrir aux familles quelques instants de rêve et d’évasion, loin de la réalité morose ».
Le quadragénaire, qui a commencé par le tag pendant sa jeunesse a réalisé des dizaines de paysages urbains ou naturels sur de très grandes surfaces. Son style envoûtant ouvert sur l’imaginaire séduit bien au-delà des frontières nationales.
Des débuts dans l’ombre du hip-hop
Passionné dès l’adolescence par le dessin et l’illustration, le montreuillois voit apparaître la première vague du graffiti au début des années 80. Il s’initie au lettrage avec des ami·e·s sur les murs du terrain vague de Stalingrad ou sur les friches industrielles de la Plaine Saint-Denis. « Le graffiti à la base, c’est fait pour les initiés » reconnaît-il. « On choisit un blaze (NDLR : pseudo) puis on remplit les lettres avec du chrome ou de la couleur. J’ai choisi de travailler la calligraphie avec des éléments 3D très compliqués, plutôt wild style et rajouter des décors à côté de ma signature ».
Le jeune homme, qui se revendique « de l’esprit révolté du graffiti » se professionnalise à 27 ans après avoir travaillé avec TF1 pour le décor du Bigdil de Vincent Lagaf’ puis pour d’autres émissions comme Bienvenue chez Cauet. Amateur de jeux vidéo et de BD de fantasy ou de science-fiction, il cherche également l’inspiration dans la peinture réaliste ou plus traditionnelle.
Très attaché à la Seine-Saint-Denis, il se lance dans dans le graff figuratif et peint sur les murs aveugles de certaines maisons des paysages urbains ou naturels aux couleurs flashy sur les murs de Montreuil, Bagnolet, Bondy et Saint-Ouen-sur-Seine.
Une carrière européenne de muraliste
Proche de la scène Street-art du Nord de Paris, SeyB participe à des fresques collectives mêlant quelquefois lettrage et décors en hommage notamment à Jules Verne et à l’univers fantastique avec les artistes Némo, Manyak, Akhine… Le muraliste autodidacte multiplie les réalisations – souvent gratuites – sur des surfaces de plus en plus imposantes, en Seine-Saint-Denis et dans les métropoles de province.
« SeyB a un sens inné des détails et de l’harmonie des couleurs » explique un de ses amis. « Ses paysages sont de grandes étendues souvent lunaires et mélancoliques, d’une grande profondeur ». Apprécié par les acteurs du département, il est régulièrement contacté pour des commandes et brosse en 2012 pour l’association montreuilloise Ni putes ni soumises une étonnante Jeanne d’Arc moderne entourée des portraits de Georges Sand, Marie Curie, Angela Davis…
Le street-artiste fonde à Bagnolet avec d’autres graffeurs Kosmopolite, le premier festival international d’art urbain qui tournera ensuite dans les grandes villes européennes. Reconnu au-delà de l’Hexagone, le muraliste a couvert de poésie l’entrée du Musée du chocolat de Bruxelles et vient de peindre une fascinante Danse des baleines sur les flancs d’un château d’eau à proximité de Tours.
Le montreuillois, qui avoue courir les bibliothèques pour imaginer ses compositions, apprécie l’effervescence du graff dans notre département : « Le 93 cherche à développer l’art urbain avec des appels à projet et une tolérance pour peindre sur certains murs de Montreuil et de Bagnolet ». Résultat : des street-art tours attirent régulièrement sur le territoire, des Parisien·ne·s avides de découvrir l’évolution de cet art. Avec les JOP de Paris 2024, ce sont des touristes du monde entier qui viendront admirer la « Seine-Saint-Denis touch », en constant renouvellement.
Crédit-photo : Franck Rondot et © Pour vos Yeux