Préserver et transmettre la mémoire sur la Résistance et la Déportation
- La Seine-Saint-Denis abrite plusieurs lieux qui ont été les témoins majeurs des événements tragiques de la Seconde Guerre Mondiale.
- Parmi eux : la Cité de la Muette à Drancy, le Fort de Romainville aux Lilas, l'ancienne gare de déportation de Bobigny...
- Soucieux de transmettre la mémoire de la Résistance et de la Déportation, le Département travaille à une mise en réseau de ces différents lieux d'histoire, afin de mieux les mettre en lumière.
La Seconde Guerre Mondiale fut, avec ses 62 millions de morts, une guerre totale d’une violence et d’une étendue sans précédent dans l’histoire de l’humanité. Elle toucha en majorité des civil·e·s et vit l’émergence de crimes de masse particulièrement atroces parmi lesquels le génocide de près de 6 millions de Juif·ve·s d’Europe, la répression féroce des Résistant·e·s et des opposant·e·s politiques…
Une fois la guerre achevée, en France comme dans le monde entier, les lieux emblématiques des événements les plus dramatiques de ce conflit prirent une grande importance aux yeux des victimes et de leurs familles pour faire leur travail de deuil et pour transmettre cette mémoire traumatique aux jeunes générations.
La Seine-Saint-Denis comprend plusieurs sites géographiquement proches qui, entre 1939 et 1945, ont été le théâtre de l’internement et de la déportation d’un tiers des Juif·ve·s de France et de plusieurs milliers de Résistant·e·s, mis en place par le régime nazi, avec la participation du gouvernement de Vichy.
Pour leur rendre hommage, des plaques commémoratives ont été posées et des visites sont régulièrement organisées au Mémorial de la Shoah en face de l’ancien camp de Drancy, dans l’ancienne gare de déportation de Bobigny ou dans les casemates de la réserve d’otages du Fort de Romainville…
La transmission, une arme contre les extrémismes
Engagé depuis des décennies pour la valorisation de ces sites, le Département a réuni le 28 novembre à Bobigny une cinquantaine d’élu·e·s du territoire et d’acteur·rice·s (historien·ne·s, directeur·rice·s de musées ou de mémoriaux, responsables d’associations ou de services d’archives…). L’objectif : lancer les premières étapes de la constitution d’un réseau des différents lieux de mémoire du territoire afin d’aider ces structures à transmettre leur message auprès du plus large public possible.
« Face aux vents mauvais, ces espaces sont des repères (…) et doivent être les témoins vivants, les vigies remuantes qui nous rappellent vers quels précipices nous conduisent les fanatismes » martèle le président du conseil départemental Stéphane Troussel. « Alors que la guerre est en Europe, que le Proche-Orient s’embrase (…) et que les idées d’extrême-droite s’installent à la tête de gouvernements, mesurons plus que jamais l’importance de ces lieux ».
Face à la hausse des actes antisémites, la collectivité a choisi de renforcer le volet éducatif, en organisant en février 2024 un voyage scolaire à Auschwitz avec quatre classes de collège, des élu·e·s et des associations du territoire… Pour matérialiser cette mise en réseau, un portail web sur les lieux de mémoire sera créé à la fin de l’année prochaine, incluant un espace numérique à destination des enseignant·e·s.
« Nous réfléchissons à des parcours mémoriels qui ressembleraient à des Éductours permettant de mieux comprendre la cohérence historique de la Déportation sur notre territoire » ajoute Mathilde Christnacht, responsable du Service Développement de Seine-Saint-Denis Tourisme. « Des parcours guidés à pied ou en car ont déjà été programmés pour la presse ou le grand public mais notre agence va enrichir cette offre de tourisme mémoriel en programmant en 2024 des trajets reliant l’ensemble des sites permettant aussi de toucher une cible internationale ».
Les collégien·ne·s sur les chemins de la mémoire
Trois classes du collège Honoré de Balzac situé à Neuilly-sur-Marne ont visité le 23 novembre le Mémorial de la Shoah de Drancy puis l’ancienne gare de déportation de Bobigny dans le cadre d’une résidence In Situ financée par le Département. Ce parcours éducatif de 60 heures, mêlant création artistique et pratique culturelle réunit cinq professeur·e·s et trois artistes intervenant·e·s autour d’un parcours éducatif explorant les thèmes du lien avec le passé, qu’il soit individuel ou collectif et du souvenir.
Lors de l’inauguration début novembre, les élèves de 3ème ont réfléchi à la notion de résistance à l’oppression par le biais d’un conte chinois lu par l’autrice Sophie David et accompagné par un violon aux accents yiddish. L’écrivaine d’origine suédo-hongroise Anna Mezay a de son côté évoqué ses souvenirs de l’Europe de l’Est pour inciter les élèves à partager certaines réminiscences par écrit… « Les visites de ces deux lieux coïncident avec les programmes d’histoire-géographie et de français » ajoute la professeure Anne-Marie Delort.
« La guide du Mémorial de la Shoah nous a expliqué que 63 000 Juif·ve·s interné·e·s à la Cité de la Muette furent conduit·e·s en bus par les gendarmes d’abord à la gare du Bourget puis à celle de Bobigny et déporté·e·s à Auschwitz » confie Irina, une collégienne de 15 ans. « C’était poignant pour nous de rentrer dans le wagon témoin de l’ancien camp de Drancy et d’imaginer la détresse des personnes qui étaient entassées là dans des conditions horribles sans savoir qu’elles allaient à la mort… ».
Dans les prochaines semaines, les adolescent·e·s verront également, dans le cadre de la résidence In Situ, une exposition dans leur collège sur les résistantes déportées, l’Hôtel des Invalides, une pièce de théâtre et un film sur le thème de la résistance, seront initié·e·s à l’art du récit entre autres par la bande dessinée… Les jeunes volontaires présenteront par ailleurs une restitution de leur travail en participant au Concours national de la Résistance et de la Déportation…
À compter de 2028, les passionné·e·s d’histoire pourront aussi visiter le futur Mémorial national des femmes dans la Résistance et la Déportation* qui sera ouvert dans le Fort de Romainville aux Lilas. L’ancienne gare de marchandises de Pantin, le Quai aux Bestiaux, réquisitionnée pour le départ de quatre convois de femmes déportées à Ravensbrück, sera également réhabilitée pour en faire un lieu de mémoire. Une façon d’inciter le public et en particulier les jeunes générations à ne jamais oublier Auschwitz et de quoi la haine et l’antisémitisme sont capables.
Crédit-photo : Nicolas Moulard et Jérémy Piot
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Il est utile et instructif de conserver la mémoire des sites ayant servi à la déportation des membres de la résistance Française mais aussi de celles du peuple Juif avec les enfants, les femmes, mais aussi les homosexuels, les prisonniers politiques, etc…!!!