Adel Fugazi, le rire sans queue, ni tête
- Avec son spectacle « Pause » qui affiche complet depuis le mois de mai à la Nouvelle Seine, le Courneuvien Adel Fugazi va vous faire mourir de rire avec ses blagues sans queue, ni tête…
- Adoubé par les festivals d’humour, de Montreux à Paris en passant par Saint-Denis, ce prince du stand-up navigue sur les réseaux sociaux en solo ou en duo avec Julien Santini.
- Il nous parle de ses débuts dans le métier, des humoristes qui montent, de son enfance. Entre non-sens et absurde, la relève de Raymond Devos est assurée.
Pourquoi ce titre « Pause » ?
Parce que le spectacle, c’est un peu une pause à tout ce qu’on entend dehors : tout le brouhaha extérieur, l’actualité, les prises de position, tout ça. C’est un moment où je m’autorise et on s’autorise à parler d’autre chose… Rien de clivant. On se réunit et on trouve une manière de rigoler ensemble, de trucs futiles, peut-être, mais qui peuvent nous rassembler. C’est un spectacle fédérateur.
Est-ce que vous vous définiriez comme un humoriste de l’absurde ?
Ce que j’aime, c’est faire des blagues qui n’ont ni queue ni tête.
Vous décortiquez les jeux des enfants, les phrases du quotidien, les mots à double sens, pour faire apparaître le non-sens…
J’aime faire parler des trucs qui ne parlent pas : des fruits de mer, des gâteaux… Si c’est ça, l’absurde. Alors oui j’en fais. C’est un peu le nerf du spectacle quoi !
Vous écrivez seul ?
Oui, le spectacle je l’ai écrit tout seul. Je confronte ensuite mes idées à des potes, des potes humoristes, des ami.e.s. Après, il n’y a que le public qui peut dire si c’est drôle ou pas. C’est le juge quoi.
Sur scène, avez-vous recours à l’improvisation ?
Non, non, tout ce qui est absurde est vraiment écrit. Il y a un peu ce côté enfantin, candide, mais c’est travaillé. Je me prends même un peu la tête sur ces trucs-là. Mais oui, il y a vraiment un texte que j’ai déposé à la SACD. Il y a vraiment un document, quoi !
Enfant, aimiez-vous déjà faire rire ?
Avec ma sœur, on faisait souvent des spectacles, des tours de magie aux repas de famille. J’ai toujours aimé un peu le spectacle, le théâtre… J’en faisais dans ma ville à La Courneuve. J’étais un peu le gars marrant, mais timide quand même avec les gens que je ne connaissais pas. Je n’étais pas très extravagant mais je faisais rire mes amis, ma famille. J’ai toujours été comme ça, mais je ne me suis jamais dit que c’était un métier.
Quel métier vouliez-vous faire petit ?
Footballeur comme tout le monde. J’ai fait dix ans de foot au Redstar, Bobigny et Saint-Ouen. Quand on m’a demandé de choisir entre le théâtre et le foot j’ai même arrêté le théâtre. Ensuite, je voulais être directeur d’hôpital, j’ai même passé les concours de la fonction publique, je suis allé jusqu’au master 1, après j’ai lâché l’affaire.
Quel est le déclic pour monter sur scène ? où avez-vous trouvé le courage ?
Je me suis lancé sur scène au moment où j’ai lâché la fac, où j’ai arrêté mes études. Au bout de mon deuxième Master 1 que je n’ai toujours pas eu. Ces études même si je suis allé loin, ce n’était pas pour moi. Du coup, qu’est-ce que t’aime faire ? qu’est-ce que tu peux faire ? Humoriste ? Il y a peut-être une possibilité ? Même, si elle n’est pas énorme… Je me suis dit « Essaie ». C’était ma dernière chance, je ne me voyais pas faire d’autres trucs.
Beaucoup d’humoriste viennent de Seine-Saint-Denis : Yacine Belhousse, Kheiron, le comte de Bouderbala, Vérino et même Pierre Desproges…
Vous allez voir que dans les années à venir il va y en avoir de plus en plus. On est beaucoup en Seine-Saint-Denis.
Il y a même un Comedy club à Aulnay
Oui ce sont des gens que je connais qui l’ont ouvert. J’ai joué chez eux au tout début de l’ouverture du lieu. Il y a des Comedy club partout maintenant, même dans les chichas. Le public qui vient à Aulnay n’est pas le même que le public parisien ou que celui des chichas du 92. L’enjeu est de parler à plein de gens et de ne pas s’enfermer pour plaire à une typologie de public. Il y a plein de public. Il faut essayer de parler à tout le monde. C’est à nous de voir plus loin, d’aller partout en France. Parce que le stand-up ce n’est pas Paris qui parle à Paris de Paris… l’idée est d’essayer de parler à tous les gens possibles.
Waly Dia y a créé le premier festival d’humour. Que pensez-vous de la scène humour en Seine-Saint-Denis ?
Waly m’a invité à son festival, c’était trop bien, vraiment super de pouvoir jouer à Saint-Denis dans une grosse salle en plus. Le prix des tickets très intéressant ont permis un accès à la culture de fou ! Les humoristes qui jouent sur Paris sont venus à Saint-Denis, avec un bon cachet. Waly a fait vraiment les choses bien. En Seine-Saint-Denis, il y a un vrai public. Il y a une demande. Alors au final, pourquoi aller sur Paris voir des spectacles, alors qu’il y a des infrastructures en Seine-Saint-Denis pour accueillir de bons spectacles. Et c’est ce qu’il a réussi à faire.
Est-ce que vous riez facilement dans la vie de tous les jours ?
Je suis plus difficile à faire rire aujourd’hui. A force d’être dans ce milieu, j’ai l’impression que cela m’a rendu un peu insensible. Et en même temps, lorsqu’on est entre humoristes, on rit comme des fous. Et parfois, il n’y a que nous qui rigolons. On est mort de rire mais pas le public. Certains humoristes ont la reconnaissance de leurs confrères mais pas encore du public.
Vous travaillez parfois avec Julien Santini. Comment votre duo est-il né ?
Avec Julien, on s’est rencontré pour la première fois sur le plateau du Don K -un Comedy club, qui se trouve sous le mythique Don Camillo. Je l’avais trouvé hilarant à Montreux. J’étais fan de lui avant de devenir son ami. Je me souviens de sa blague dans les loges du Don K. il y avait une petite vitre entre la cuisine et la loge et Julien toque à la porte : « Fugazi au parloir !! » ça m’a tellement plié de rire que quelques jours plus tard, on a démarré nos vidéos ensemble. On ne s’est pas lâché. Son spectacle est vraiment super. Il me fait pleurer de rire. Je l’ai vu 7-8 fois je le connais par cœur… Hilarant.
Dans votre spectacle à la Nouvelle Seine invitez-vous d’autres humoristes sur scène.
Mes premières parties changent beaucoup. Il y a bien sûr mon ami Félix Junier qui est en train de bien prendre sur les réseaux. On a commencé le stand-up le même jour, il y a 6 ans dans un cours de stand-up. Il est de Melun. Il y a aussi mon pote Markouch. Et mon pote Patrick Douglas. C’est lui qui m’a fait démarrer le stand-up. On s’est rencontré à la fac, en troisième année de Licence, à Paris 13 Villetaneuse, lui il faisait déjà de la scène. Je n’en avais jamais fait, mais j’adoré trop ça, j’étais trop bon public. Alban Ivanov, Bun Hay Mean, il les connaissait. Du coup, je l’ai suivi sur scène pendant deux ans sur tous les plateaux. Avec la voiture je le déposais, je le ramenais, il habitait comme moi en banlieue, à Noisy-le-Sec. Après deux ans à le suivre, je me lance enfin. Avant, je n’en avais pas le courage. Pendant six mois je prends des cours de stand-up au Sonart à Pigalle. Il y avait Felix, Rodrigue qui est un humoriste qui marche très bien aussi.
Écrire c’est douloureux ou c’est un plaisir ?
J’aime bien le processus de création. J’écris beaucoup sur mon téléphone, sur mon PC, des notes et je reviens dessus quand j’ai le temps. Je n’ai jamais écrit dans la douleur, dans la difficulté. Je ne suis pas le plus assidu des auteurs. Ça va tranquillou. Mais je me force à une certaine rigueur pour ma production sur les réseaux sociaux. Je m’oblige à ne mettre que des nouveaux passages qui ne sont pas dans le spectacle. Le meilleur je le garde pour le spectacle.
Théâtre La Nouvelle Seine, 3 Quai de Montebello
Paris 5.