« 24 place Beaumarchais », itinéraire d’un gamin de banlieue

« 24 place Beaumarchais », itinéraire d’un gamin de banlieue
Théâtre
  • Dans ce one-man show énergique mais surtout émouvant, Brahim Koutari raconte sa trajectoire, de la banlieue de Grenoble à la scène de la Comédie de Saint-Etienne.
  • Ce spectacle qui rappelle que l’égalité des chances est encore loin d’exister en France résonnera aussi auprès de nombreux jeunes de Seine-Saint-Denis.
  • Interview avec le comédien de 30 ans, qui joue au Théâtre Gérard-Philipe de Saint-Denis jusqu’au 16 novembre.

Pourquoi avez-vous souhaité raconter votre histoire ?

Vous aurez noté que le spectacle ne s’appelle pas Brahim Koutari, mais « 24 place Beaumarchais ». Je tenais à ça parce qu’une adresse, c’est à la fois privé et public. En plus, il se trouve que cette adresse d’Echirolles, où j’ai grandi, permet aussi un clin d’œil à un auteur de théâtre. Je pense que dans mon parcours, pas mal de gens vont se reconnaître. Et puis il y a aussi ceux qui n’auront rien à voir avec ça mais que cette histoire de vie aura touché. En gros, avec l’autrice Adèle Gascuel et la metteuse en scène Catherine Hargreaves, on a voulu que ce soit un texte qui parle du peuple.

Vous racontez comment vous avez découvert le théâtre au lycée. Qu’est-ce qui vous a tant plu dans le théâtre ?

C’est la possibilité de m’exprimer, de mettre des mots sur mon vécu mais aussi d’être plein d’autres personnes à la fois. De pouvoir jouer, m’amuser, rigoler… Tout à coup, j’ai pu jouer des empereurs, des grands textes, c’était inespéré. Ma toute première rencontre avec le théâtre, je la dois à ma professeure de français en bac pro Chantal Morel, qui m’a fait jouer dans Don Quichotte.

Même quand des théâtres programment des pièces qui parlent de la banlieue, on remarque qu’il est difficile de faire venir des gens des quartiers populaires au théâtre. Pourquoi selon vous ?

Parce qu’on choisit les sujets à leur place. A mon avis, il faudrait prendre plus le temps de les rencontrer, de savoir de quoi ils veulent parler.

Sur scène, vous évoquez aussi le football qui habituellement n’a pas beaucoup sa place au théâtre…

Le foot, c’est le sport dans lequel j’ai grandi. Je ne vois pas pourquoi en France on oppose tant sport et activités intellectuelles car pour moi, il y a beaucoup de points communs entre le théâtre et le foot. Les deux rassemblent, les deux font passer des émotions. Et ce n’est pas pour rien qu’on parle des « acteurs d’une rencontre ».

Vous venez de tourner dans une série sur Netflix, Les Lionnes, avec Rebecca Marder, Pascale Arbillot, ou encore Jonathan Cohen. Ça raconte quoi ?

L’histoire d’un groupe de femmes en difficultés financières, qui décident d’aller braquer des banques.

Propos recueillis par Christophe Lehousse

Photos: ©Jean-Louis Fernandez

Echirolles-Saint-Denis, même combat

Les contrôles humiliants de la police quand on est un jeune homme arabe qui grandit en France, l’absence de réseau quand on vient d’un milieu populaire ou encore l’obligation de prouver qu’on est intégré alors qu’on est né en France… A travers son parcours, Brahim Koutari traite de tout cela et de bien d’autres choses encore. Lui qui a grandi à Echirolles, au sein d’une famille d’origine marocaine, dans un quartier populaire de Grenoble, parvient à mettre en mots des statistiques qui hélas restent depuis de longues années les mêmes : en France, il y a quatre fois moins d’enfants d’ouvriers que de cadres à faire des études supérieures. Même le théâtre, cette discipline qu’il aime tant, Brahim le met face à ses vérités : lui aussi reste encore beaucoup trop un domaine d’héritiers, une chasse gardée. Ce long monologue écrit par Adèle Gascuel et mis en scène par Catherine Hargreaves, où le jeune homme jongle avec les mots comme Karim Benzema avec un ballon, saura toucher tout le monde, peu importe son milieu social.

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